Ça y est, c’est la fête de la musique, violente cacophonie qui envahit les rues de nos villes. Et même si tu préférerais rester cloîtrer chez toi avec des boules Quies profondément enfoncées dans tes orifices auditifs, il est presque sûr que l’un de tes potes va réussir à te traîner dehors. Et plus tes tympans se fragilisent, plus tu réalises que tu as atterri dans un monde parallèle. Mais qu’est-ce donc que la fête de la musique alors ?

C'est en fait une kermesse : tu croises plus de merguez grillées que de musiciens

Depuis le début, ces innombrables stands de hot-dogs te font de l’œil. Difficile pour toi de résister alors qu’une délicate odeur de barbecue embaume la ville entière. Pendant ce long périple musical, ton regard est sans cesse attiré par ces merveilleuses saucisses que tu finiras forcément par acheter et dévorer d’une traite. On le sait.

C'est en fait une séance de torture : foutre un groupe de percussions brésiliennes à proximité d'un groupe de métal = supplice

Non mais sérieusement, quel est le projet ? On écoute une Bossa Nova de notre oreille droite et de l’autre une reprise bancale de Metallica en espérant parvenir à dissocier parfaitement les deux mélodies ? HEIN C’EST ÇA ? Et bien, non ce n’est pas possible. La seule chose que l’on ressent lorsque l’on pénètre dans une rue où plusieurs groupes jouent en même temps, c’est l’envie de se taper la tête contre un mur.

C'est en fait une réunion des Anciens de ton lycée : tu y croises tous plein de connaissances oubliées

Ah lala, ils ne t’avaient vraiment pas manqué, tes petits camarades de cours. Ils habitent à quelques centaines de mètres de chez toi mais tu ne les croisais jamais. Pourtant ce soir, tu vas devoir les saluer en leur offrant ton sourire le plus crispé. Tu vas devoir faire semblant de t’intéresser à leurs études ou boulots alors que tu t’en triplecarres. Et c’est dur.

C'est en fait un rituel satanique : nombreux succès musicaux sont sacrifiés pendant cette soirée

Certains titres ont été profondément usés par nos jeunes collégiens mélomanes. Et souvent, il s’agit étonnamment de pop rock datant de la fin des années 90. Parmi eux : « Zombie », « Creep », « Wonderwall », « La Bombe Humaine »... Et le morceau qui prend le plus cher en cette période de fête de la musique esssst : « Smells Like Teen Spirit » (Tintin, tintintin tintinnnnn tintin tintintinnnnn)

Si tu commences à apprécier la musique, c'est parce que tu es bourré(e)

Et oui, il a bien fallu que tu t’occupes pendant ces longues heures d’errance musicale. Et tu en as bu des petites binouzes sans même réaliser que les odeurs de merguez et de sueur commençaient à te monter au cerveau. Voilà pourquoi, vers 23h30, lorsque tu croises ce jeune homme reprenant Creep l’air contraint et souffreteux, une émotion violente te submerge et tu es soudainement saisie par tes souvenirs d’adolescence quand personne ne voulait de toi à cause de ton physique ingrat. L’alcool c’est mal.

On n'y a jamais croisé Beyoncé, mais alors jamais

Et c’est pas faute d’espérer.

C'est en fait un parcours du combattant : tu passes ta soirée à errer dans les rue de ta ville à la recherche d'un bon concert

Tu es confronté à moult obstacles pendant cette rude épreuve. Entre les discussions d’une vacuité sans précédent avec tes anciens camarades de cours, les tentations culinaires de type saucissistique et les violences infligées à tes oreilles, les entraves sont nombreuses pour t’empêcher d’arriver au bout de ce circuit de la mort.

C'est en fait une rixe : nombreux sont les instruments violentés pendant cette soirée

Des guitares dont on étire les cordes sans une once de respect. Des pianos dont on graisse les touches sans le moindre égard. Des batteries dont on menace de démolir les fondations. Et des micros que l’on recouvre de baves. Cette soirée n’est définitivement pas une aubaine pour nos pauvres petits instruments.

C'est en fait l'occasion pour toi d'être un gros relou méprisant quiconque tente sa chance dans la musique

Non parce que t’es là à me lire en train de critiquer depuis huit points sans te remettre en question. Mais est-ce que toi à 15 ans, tu aurais osé prendre ton petit ukulélé et t’égosiller devant une foule (enfin deux, trois pécores) ? JE NE CROIS PAS NON.

« LA MUSIQUE, DANS LA PEAU… »