Les séries passent leur temps à raconter l’histoire d’une époque à travers une figure marquante dont l’épopée fascine. Mais pas la peine de faire marcher son imagination pour trouver de telle figure : l’Histoire en est truffée, c’est même comme ça qu’on nous l’enseigne. Et on pourrait très bien nous l’enseigner sur Netflix.

L'interprète de Christophe Colomb

Le pitch : Louis de Torres maîtrise les langues orientales. Forcé de se convertir au catholicisme en pleine expulsion des juifs d’Espagne, il est approché par Cristophe Colomb et doit l’accompagner aux Indes pour servir d’interprète. Sauf que, comme on le sait, Colomb n’arrivera jamais aux Indes. On imagine la gueule de Luis de Torres en train de parler hindi aux Amérindiens. Ensuite, Colomb lui intime de rester sur place tandis qu’il rentre en Espagne prévenir Isa la Catho de sa découverte. Luis de Torres essaie de diriger ses hommes, mais ceux-ci finissent pas kidnapper des femmes et tout le camp européen se fait massacrer.

James Jesus Angleton, le chef de la CIA dont la parano a paralysé les services

Le pitch : Malgré un parcours un peu médiocre, Angleton, formé par le britannique (et agent double, on en reparlera) Kim Philby, prend la tête du contre-espionnage de la CIA. Passionné d’orchidées (il en fout partout), Angleton commence à semer un bordel monstre au sein de la centrale en raison de sa paranoïa aiguë. Persuadé que la CIA est truffée d’agents soviétiques, il mène de grandes opérations de purges qui paralyse l’activité des services secrets américains. Tout en continuant à déjeuner avec son ancien mentor, Philby, tous les mercredis. Jusqu’au moment où celui-ci est exfiltré en URSS alors que le MI6 s’apprête à découvrir qu’il est un agent double depuis le début. Angleton pète un plomb, mais il est aussi et surtout soupçonné d’avoir volontairement paralysé la CIA pour le compte des Soviétiques. Finalement débarqué, Angleton meurt dans l’anonymat en 1987.

Crédits photo (Domaine Public) : unknown employee of US federal government

Paul Marcinkus

Le pitch : Monseigneur Paul Marcinkus, excusez-du peu. Garde du corps de Jean-Paul II, directeur de la banque du Vatican, Marcinkus, numéro 3 du Vatican, est soupçonné d’avoir ordonné la mort de Jean-Paul Ier, pape resté en mandant en tout et pour tout 33 jours et qui voulait faire le ménage dans les finances du micro-Etat. Marcinkus entretenait également des liens avec Cosa Nostra et la loge P2, une société secrète d’extrême-droite qui réunissait énormément de dignitaires et de fonctionnaires italiens au lendemain des années de plomb. Inquiété lors de la faillite du Banco Ambrosino (dont tous les dirigeants se « suicident »), il est finalement relaxé suite à une décision de la Cour de Cassation et repart s’installer aux Etats-Unis.

Crédits photo (Domaine Public) : Marcinkus_retouch.jpg: Penarc

Frédégonde

Le pitch : Gentille petite servante, Frédégonde était assoiffée de pouvoir. Elle se démerde pour que Chilpéric, qui régnait sur le royaume de Soissons, dégage sa femme et couche avec elle. Et quand Chilpéric se marie, elle s’arrange pour faire assassiner sa deuxième femme. Chilpéric n’a plus le choix et prend Frédégonde pour épouse. Ensuite, c’est le bordel, mais une guerre fratricide éclate entre Chilpéric et son frère et en gros Frédégonde fait assassiner le frère, la femme du frère, la première épouse de Chilpéric, leurs enfants, puis Chilpéric lui-même. Bien ouej.

Crédits photo (Domaine Public) : Obersachse

Martin Bormann

Le pitch : Secrétaire personnel de Rudolf Hess et numéro 2 du régime nazi après la capture de celui-ci, Bormann est l’un des plus proches amis et conseillers de Hitler. Célèbre pour sa brutalité, anti-chrétien convaincu, il mène une vie de bigamie avec l’aval de sa femme et fait des dizaines de gosses. A la fin du Troisième Reich, Bormann se saoûle la gueule et laisse Hitler se suicider tout seul : lui choisit la fuite dans un Berlin en ruines. Et là, les avis divergent : certains affirment qu’on a retrouvé sa dépouille dans les décombres de la ville investie par les Alliés, mais d’autres pensent que Bormann a réussi à prendre la fuite via l’un des réseaux d’évacuation nazis, emportant avec lui un véritable trésor de guerre qu’il aurait remis à Peron pour obtenir l’asile en Argentine pour lui et d’autres anciens dignitaires nazis.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : UnknownUnknown

Jacques Vergès

Le pitch : Avocat anticolonialiste né au Laos, porteur de valises pour le FLN, Vergès est aussi l’époux de Djamila Bouhired, condamnée pour ses activités indépendantistes en Algérie. Celui qui a fait ses études avec Pol Pot invente la défense de rupture, une mobilisation médiatique organisée autour d’un procès politique pour obtenir l’appui de l’opinion publique. Sauf que tout à coup, un beau jour, Vergès abandonne femme et enfant et disparaît. Personne ne sait où il est. Entre 1970 et 1978, aucune nouvelle : Vergès ne dira jamais à personne ce qu’il a fait pendant ce temps-là. Etait-il en Algérie, en Chine, au Cambodge avec son ancien (Pol) Pote ? Toujours est-il qu’il revient avec une valise de billets et se met à faire de la thune : il défend le terroriste Carlos, puis Klaus Barbie, puis Maurice Papon, puis Laurent Gbagbo… Que des pourris, que des horreurs. Un changement total de braquet par rapport à ses engagements de jeunesse. Et une figure qui aura traversé toute l’histoire de la deuxième moitié du XX° siècle.

Crédits photo (CC BY-SA 2.0) : Extraordinary Chambers in the Courts of Cambodia

Hedy Lamarr

Le pitch : Une jeune actrice qui se révèle sur les écrans en Autriche et en Allemagne. Une actrice confirmée qui fuit l’Allemagne nazie pour les Etats-Unis. Une star d’Hollywood qui joue avec les plus grands. Un fantasme en noir et blanc, première actrice à avoir joué un orgasme féminin à l’écran. Et puis, tout simplement, dès 1941, la co-inventeuse d’un système de communication qui donnera tour à tour naissance au GPS, au WiFi et à la téléphonie mobile. Une femme qui aura donc parcouru l’intégralité du spectre du XX° siècle.

Crédits photo (Domaine Public) : Employee(s) of Lion-Eagle Films

Pierre Ier du Brésil

Le pitch : Depuis plusieurs années, la famille royale portugaise s’est installée au Brésil. Alors que des révoltes libérales éclatent au Portugal, voilà le roi tenu de rentrer à Lisbonne pour prendre la situation en mains. Non sans avoir préalablement demandé à son fils, Pierre, de rester à Rio pour gérer les affaires courantes. Mais Pierre, né au Brésil et profondément attaché à la terre, réussit le tour de force absolument dément d’apaiser les tensions libérales naissantes sur l’immense territoire en décrétant l’indépendance du Brésil au détriment des ordres de rapatriement qui lui arrivent de Lisbonne. L’histoire d’une décolonisation réussie dans le calme (et d’un mec malin).

Crédits photo (Domaine Public) : Simplício Rodrigues de Sá

Markus Wolf

Le pitch : Juif allemand ayant fui en URSS avec sa famille, Wolf intègre une école d’élite où il est formé aux techniques élémentaires de l’espionnage. De retour en RDA en 45, le voilà qui participe à la création de la Stasi en 58, après avoir exercé des fonctions diplomatiques. Dès lors, Wolf met en place le système d’espionnage le plus élaboré de toute la Guerre Froide, avec plus de 3000 agents actifs sur le territoire est-allemand. Il devient l’ennemi numéro 1 des services secrets occidentaux jusqu’à la chute du régime. Partisan de la perestroïka, il prend peu à peu ses distances avec le régime communiste, résiste aux purges post-chute du mur et finit par publier un livre de cuisine russe, en 1997.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : Elke Schöps

Talleyrand

Le pitch : Cent ans de pouvoir, ou presque. Talleyrand a probablement été le plus grand intrigant de tout le XVIII° siècle. D’abord prêtre, il quitte le clergé au moment de la Révolution, devient député, président de l’Assemblée nationale puis ministre des relations extérieures pendant le Directoire, nouant à ce titre des relations intenses avec tous les pays européens. Ensuite, il est de l’aventure napoléonienne mais réussit à rebondir à sa chute en devenant chef du gouvernement provisoire à la Restauration, puis ambassadeur sous Louis-Philippe. Le mec le plus malin du monde, protégé et donc intouchable, ressort indispensable à tout leader politique.

Crédits photo (Domaine Public) : Pierre-Paul Prud'hon

Hâte de voir les séries.