Alors que certains s’extasient devant les fesses, d’autres se pâment pour les yeux, quand leurs cousins parlent des seins et leurs parents des lèvres et leurs neveux des cheveux, d’aucuns n’en ont que pour la peau et le reste mourrait pour des jambes ; mais des paupières qui en parle ? Et des sourcils ? Et des omoplates ? Injustice réparée.

Les genoux

J’adore tes rotules. Elles craquent et se déplient avec une grâce rare. Tu as du sang royal ? T’as de ces genoux… Racés, élégants, dessinés, c’est de l’articulation de luxe, là, c’est du Cartier, c’est du Dior, on dirait un joint de soudure en tungstène, c’est de la bonne, OH OUI DEPLIE TES GENOUX ET REPLIE LES, OH OUI !

Les paupières

Oui, c’est ça, ferme les yeux, ferme les yeux, t’es plus belle que jamais quand tu fermes les yeux, oh oui ces paupières si fines, on devine à peine les vaisseaux qui courent là-dedans et quand les cils se rejoignent ça me fait trembler comme une feuille, oh tes paupières, oh tes paupières !

Les coudes

Oui, j’aime quand ton avant-bras se replie pour devenir presque parallèle à ton bras, et j’aime aussi quand tu formes un angle-droit bien stable, là, quand ton coude tient le choc, qu’il tient le coup, que sa petite pointe frétille et que ta peau se creuse aux encoignures, ah, c’est quelque chose, j’ai envie de le lécher, ton coude, de l’embrasser, de me prosterner devant lui, ah AH !

Les métacarpes

Quand je vois toutes les veines qui affluent autour de tes métacarpes et les tendons qui se dressent sur la main à mesure que tu les agites, quand je vois ton index et ton majeur qui s’entrelacent pour écrire sur ton clavier et que, comme des touches de piano, tes métacarpes une à une se contractent et se rétractent, c’est simple, j’en viens à croire à l’existence de Dieu.

Les narines

Ton nez, bien sûr, c’est quelque chose, c’est racé, c’est Célopâtrien, mais les narines… Profondeur infinie, cavité mystérieuse… Ca te dérange si je te parle en penchant ma tête pour bien les observer, bien les admirer ? Ca te dérange si je les touche, si je glisse mon doigt dedans ? Ce ne sont pas des narines, ça, ce sont des sirènes qui se gonflent et se dégonflent au fil d’un océan invisible !

Les lobes d'oreille

Tu permets que je touche ? Tes lobes pendent avec une élégance absolument unique. Tu fais bien de ne pas les gâcher par la présence de boucles d’oreille, ce sont des bijoux en tant que tels ; leur port est altier, leur couleur divine, et cette masse un peu graisseuse ressemble à une crête de coq. C’est PUISSANT.

Les omoplates

Ton dos, je n’en sais rien, mais tes omoplates ! Ces formes bien rondes et aiguisées qui parfois semblent percer la peau, cette rotondité dans le mouvement, c’est la vie, ça, c’est la vie ! On pourrait dessiner des paysages autour, paysages chatoyants, jardins d’hiver, grandes plaines, c’est l’Amérique, tes omoplates, c’est la Sibérie et l’Eldorado ! J’aime les aimer.

Les talons

Oh oui marche encore, mais de dos. Non je m’en fous de ton cul, ce que je veux voir, c’est le doux soulèvement de ton talon oblong quand il quitte le sol pour s’y harnacher un peu plus loin. Quand il se libère de l’emprise terrestre pour voler : un oiseau ! On dirait un oiseau ! Et comme il est leste quand il se repose, comme il est docile et gracile et aérien !

Les sourcils

Laisse-moi te caresser les sourcils à l’infini, laisse-moi glisser mes doigts dans les forêts profondes de tes mystérieux poils, laisse-moi envisager leur profondeur, leurs secrets, laisse-moi observer leur forme allongée, leur alignement, leur puissance. Laisse-moi me donner à eux.

Le palais

Ouvre grand la bouche ? Ha ! Ha ! Je n’avais jamais vu chose plus belle. Une beauté pareille, c’est à se damner ! Ces petites alvéoles, cette couleur chair, claire, éclatante de santé, cette longue cavité donnant sur les amygdales, on voudrait s’y fondre entièrement. Ah ton palais ! HA ! HA TON PALAIS !

Il faut de tout pour faire un monde.