Ok, 2020, c’est l’heure du bilan, et on débat pour savoir si la série des années 2010 est celle avec les dragons ou celle avec les lames de rasoirs dans les casquettes. Mais en vrai, des séries comme ça, on en aura encore dans les dix ans à venir. Alors qu’un monument comme Mr Robot, pas sûr. Si vous voulez dire à vos petits-enfants un jour « de mon temps, on matait des séries de qualité », donnez ce titre à Mr Robot.

Le scénario est incroyable

Et ça, on le comprend dès la première saison. Ensuite, on se retrouve à suivre toutes sortes de théories pour essayer de rendre cohérent ce qu’on vient de voir. Comme au bon vieux temps de Lost, la meilleure série de la décennie précédente (ou pas bien loin). On ne demande pas grand chose à une série, mais si elle peut mobiliser un peu notre intelligence et considérer ses spectateurs comme des interlocuteurs sérieux, ce n’est pas plus mal.

La réalisation est un travail d'orfèvre

Avant d’être un créateur de série ambitieux, Sam Esmail est un réalisateur brillant et pointilleux. Ce fan de Kubrick fait surtout la démonstration de ses skills à partir de la saison 2 (et s’offre même un épisode entier en plan-séquence dans la saison 3), mais aussi dans l’excellente série Homecoming. Si vous êtes un peu photographe ou vidéaste, le visionnage de Mr Robot devrait vous donner envie d’expérimenter des choses.

L'interprétation de Rami Malek est déjà légendaire

Il pourra être Freddie Mercury ou un méchant dans James Bond, Rami Malek restera pendant un bon moment « le mec qui joue dans Mr Robot » tant il aura porté le hoodie avec style. Le(s) thème(s) abordés aurait pu rapidement faire de cette série une dystopie simpliste pour ado, mais le jeu de Malek y apporte de la profondeur. Et cette voix off contribuera à rendre ces 4 saisons inoubliables.

La galerie de personnages est phénoménale

Avec un personnage aussi fort qu’Elliot, on pouvait s’attendre à ce que le reste de son univers soit d’une normalité affligeante. Mais au gré des rencontres, que ce soit celle de Tyrell, genre d’American Psycho venu de Scandinavie, de Leon, amateur improbable de Seinfeld ou Irving, lieutenant de la tentaculaire Dark Army qui aspire à devenir auteur de polars, on comprend que le monde est un peu plus complexe qu’on l’imaginait.

La musique est choisie avec soin

Sam Esmail a l’âge d’un type qui écouté du rock de qualité dans les années 1990, qui avait un grand frère ou une grande soeur à qui il a taxé quelques albums de The Cure ou Television, et qui a eu le temps de se faire une petite culture jazz et classique. Du coup, la bande son est aussi éclectique qu’efficace. Et puis il y a « Mr Roboto »…

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Il est parti à la ferme des liens cassés pour prendre des petites vacances, il est avec tous ses copains, ne t'inquiète pas.

Les codes narratifs sont contournés un par un

En tant que spectateur, vous êtes un interlocuteur d’Elliot. Et même l’un de ses amis imaginaires. Mais pas tout le temps. Et parfois, Elliot n’est pas fiable, il faut prendre tout ce qu’il nous raconte avec des pincettes. Étant donné la tournure des événements dans la saison finale, c’est pas plus mal de nous avoir préparés à relativiser nos certitudes.

Il n'y a pas de "bien" ou de "mal"

Et on ne passe pas 4 saisons à attendre que les « gentils » bottent le cul des « méchants ». à la limite, c’est plus simple de se dire que tout le monde est potentiellement du côté obscur. Parce que vous risquez de vous attacher à un personnage qui s’avère être un vrai salopard.

Les sujets abordés sont ancrés dans leur époque

Nos rapports aux réseaux sociaux, les traumatismes de l’enfance, notre notion de la « normalité », la conspiration des « 1% des 1% » les plus puissants qui hante notre imaginaire commun, la Chine, les sociétés secrètes, Anonymous… Peut-être que Mr Robot vieillira mal et qu’on aura du mal à associer toutes ces références dans quelques années. Du coup, autant lui donner le titre de meilleure série de la décennie tout de suite.

La dernière saison est à elle seule un "Christmas Special"

Voila peut-être ce qui a manqué à cette grande saga dont a fin nous a, parfois, déçus. Imaginez si les événements de la dernière saison de Game of Thrones se tenaient sur quelques jours au moment où les Lannister préparait le Réveillon et que les Stark faisaient leur liste au Père Noël (« Une arbalète ? T’en as pas déjà une ?… »), ça aurait eu une autre gueule.

La série s'est achevée le 22 décembre 2019

Pour être la série de la décénnie, on s’efforce de ne pas être à cheval sur deux décades. Sam Esmail a rendu sa copie juste à temps pour être eligible à ce titre.

Bon, ok, peut-être pas « série de la décennie », mais au moins le podium, c’est sûr.