Quand on évoque Paris on pense tout de suite « Tour Eiffel » et « Champs Elysées ». Mais la Ville Lumière ne s’est pas faite en un jour et les monuments mythiques qui participent aujourd’hui au rayonnement de la Capitale sont venus remplacer d’autres lieux dont l’histoire, parfois insolite, mérite qu’on prenne le temps de s’y attarder, ne serait-ce que pour pouvoir frimer en soirée.

Fontaine de la Régénération (actuel emplacement de la place de la Bastille)

Une fontaine représentant la déesse égyptienne Isis entourée par deux lions, érigée en 1793, et commémorant la prise du Palais des Tuileries et la chute de la monarchie constitutionnelle en août de l’année précédente. Ah, et de l’eau jaillissait de ses seins. Oui, de ses seins. On savait faire des statues à l’époque.

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La Tour du Philosophe (Montmartre)

Emblème de l’ancien maquis de Montmartre, quartier pauvre où coexistaient artistes et marginaux dans des habitations de fortune, la Tour du Philosophe doit son nom à son propriétaire. Le bonhomme s’asseyait souvent sur son balcon pour regarder passer les saisons. Mais peut-être qu’il voulait juste se faire tirer le portrait par un mauvais caricaturiste. On ne sait pas trop.

La Forteresse du Grand Châtelet (actuelle place du Châtelet)

Avant d’être le changement le plus chiant du métro parisien, le Châtelet était surtout une forteresse. Édifiée au XIIème siècle par Louis VI le Gros pour remplacer les anciennes constructions en bois qui protégeaient l’accès à l’Île de la Cité des envahisseurs, l’imposant édifice a abrité jusqu’à la Révolution de sympathiques salles de torture et geôles. Certaines cellules portaient des noms évocateurs, comme La Fosse, et étaient si inhospitalières que les prisonniers y survivaient rarement plus de quelques semaines. La démolition de l’ancienne prison fut décidée après le massacre de septembre 1792 durant lequel 216 détenus furent sauvagement abattus par des émeutiers en colère (journée qui devait déjà un peu ressembler à l’ouverture des soldes aux Halles).

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Les Arènes de Lutèce (Rue Monge)

Datant du Ier siècle de notre ère, elles pouvaient accueillir 17 000 spectateurs qui venaient assister aux jeux du cirque. Menacées par la construction d’un dépôt de tramway au XIXème siècle, elles ne doivent leur salut qu’à l’intervention de la Société des amis des Arènes qui comptait parmi ses membres prestigieux des soutiens comme Victor Hugo. Aujourd’hui les vestiges servent de terrain pour des parties de football et de pétanque. Le bouliste, ce gladiateur moderne.

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Le Colisée (actuel quartier des Champs-Elysées)

Inspirée des codes de l’architecture romaine, la construction du Colisée fut achevée en 1771. L’établissement pouvait accueillir jusqu’à 40 000 visiteurs qui flânaient entre les boutiques et les nombreux cafés. On pouvait aussi y assister à des spectacles pyrotechniques et des reconstitutions de batailles navales. Le Puy du Fou sous l’Ancien Régime mais sans les odeurs de graillon.

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La Bastille (actuel emplacement de... ben la place de la Bastille)

Édifié au XIVème siècle, il s’agissait à l’origine d’un bâtiment destiné à défendre les remparts de l’est de Paris et à protéger le roi en cas de révolte du peuple. Mais quand une forteresse miliaire est davantage renommée parce qu' »assiégée, elle s’est toujours rendue » plutôt que pour sa réputation d’édifice imprenable, on comprend qu’elle se transforme rapidement en prison. A partir du règne de Louis XI, La Bastille a donc abrité des personnages illustres comme Montaigne, le Marquis de Sade ou encore Voltaire. L’endroit était d’ailleurs plutôt confortable pour les nobles et les bourgeois qui déjeunaient à la table du gouverneur, séjournaient dans de grandes pièces meublées ou pouvaient même s’y installer avec leur domestique. Bon, pour les pécores en revanche la vie en cellule était un peu moins cool… Pour éviter que l’identité des pensionnaires soit connue, les gardes se couvraient le visage et les boutiques alentours fermaient dès que le tintement de cloche annonçant une nouvelle arrivée retentissait. Et les enterrements de prisonniers avaient aussi lieu la nuit. Vous saisissez un peu mieux le succès du mythe de l’homme au masque de fer du coup ?

Crédits photo (Domaine Public) : Theodor Josef Hubert Hoffbauer

Gibet de Montfaucon (actuelle place du Colonel Fabien)

Principal gibet des rois de France jusqu’à Louis XIII, on y laissait pourrir les corps des suppliciés afin de dissuader quiconque d’enfreindre la loi. Le gigantesque édifice pouvait contenir 50 cadavres en même temps, suspendus par de lourdes chaînes afin d’être visibles, même de loin. Des archers surveillaient le gibet en permanence afin d’empêcher les veuves éplorées de venir détacher leurs morts et les étudiants en Médecine de récupérer les dépouilles pour faire avancer la science, ces charognards.

Crédits photo (Domaine Public) : Jean Fouquet

Les abattoirs de la Villette (actuel Parc de la Villette)

Avant d’attirer tous les anémiques parisiens en manque de verdure, le site accueillait depuis la fin du XIXème d’immenses abattoirs qui furent rasés dans les années 70. Si vous en avez marre d’être invité partout on vous encourage à placer cette anecdote, l’air de rien, la prochaine fois que vous siroterez votre Kro entre deux concerts de la Villette Sonique.

Crédits photo (Domaine Public) : Auteur inconnuUnknown author

L'ancien palais du Trocadéro (actuel palais de Chaillot)

Édifié à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1878, le bâtiment, éphémère à l’origine, survivra pourtant jusqu’en 1937. Inspiré de l’architecture mauresque et néo-byzantine, l’ancien palais abritait en son temps la plus grande salle de fête parisienne (5000 places quand même, on est loin de la MJC d’Enghien-les-Bains). Jugé obsolète et moche par l’intelligentsia de l’époque, et aussi parce qu’apparemment l’acoustique n’était pas tip top, il fut démoli au profit d’une structure plus moderne.

Crédits photo (Creative Commons) : Brooklyn Museum

Luna Park Porte Maillot (emplacement actuel du Palais des Congrès)

Ouvert en 1909, on y trouvait de nombreuses attractions modernes pour l’époque. Les Montagnes russes n’ont malheureusement pas résisté à la crise économique des années 30 et le parc a fini par fermer ses portes pour laisser place au Palais des Congrès, un centre d’affaires plein de gens pressés qui portent des cravates moches. Et voilà comment meurent nos rêves d’enfants.

Crédits photo (CC0 1.0) : Bibliothèque historique de la Ville de Paris

La dernière Cour des miracles (près de l'actuelle rue de Cléry)

Rasée en 1667, mendiants et hors-la-loi s’y retrouvaient à la nuit tombée pour partager leurs butins. Le terme « argot » provient d’ailleurs de « Le Ragot », l’illustre inconnu qui fut pendant un temps le chef de cette communauté de miséreux.

Crédits photo (Domaine Public) : Gustave Doré

La statue de la Liberté ( Rue de Chazelles dans le 17ème arrondissement)

Bon d’accord, c’était pas vraiment fait pour durer à la base mais on ne pouvait pas ne pas la mettre. Le XVIIème arrondissement de Paris a abrité pendant quelque temps la Statue de la Liberté, la vraie, pas la version miniature de l’île aux Cygnes. Mais c’était avant qu’on l’offre aux amerloques en gage d’amitié. Et visiblement, ça leur suffisait pas qu’on leur file une statue. Il fallait aussi qu’ils nous piquent David Guetta et Johnny. Pilleurs de trésors nationaux !