En 2017, la fondation Abbé Pierre mettait à disposition la plateforme édifiante Soyons Humains sur laquelle les internautes du monde entier pouvaient dénoncer les dispositifs anti-SDF les plus répugnants.

Suite aux nombreuses contributions, la cérémonie des Pics d’Or se poursuit pour une seconde édition, remettant des prix (ironiques) aux villes les plus inventives en matière de chasse aux SDF : bancs pleins de pics, grillages, arrêtés anti-mendicité. Un magnifique palmarès de 24 installations et mesures anti-SDF ont été mises à l’honneur. C’est que, peut-être ne l’avez vous jamais remarqué, mais depuis plusieurs années, le mobilier urbain anti-SDF est très à la mode aux quatre coins du monde. Le concept est assez simple : empêcher par tous les moyens les sans-abris de s’installer là où ça pourrait refroidir ou effrayer les autres concitoyens et ce, quitte à carrément les empêcher de s’allonger pour dormir. Bel esprit de camaraderie en somme.

Le banc transformé en siège une place

Pic d’Or 2019 du « dispositif le plus décomplexé » remis par la fondation Abbé Pierre à la ville de Biarritz pour cette bien elle invention : transformer un banc en in siège une place pour éviter que les mecs ne s’allongent.

Le banc pas pratique du tout de Nantes

Lauréat 2019, cette fois-ci dans la catégorie « ni vu ni connu ».

Les grillages

Notamment autour des bancs, comme à Angoulême où neuf bancs du centre-ville ont été grillagés à la veille de Noël pour empêcher leur utilisation « par des personnes qui se livrent à une alcoolisation récurrente, tous les jours ». L’initiative a heureusement scandalisé les habitants, et les grillages ont été retirés, mais la mairie a précisé que c’était provisoire et qu’ils seraient remplacés par des galets empêchant eux aussi l’installation de SDF. Ça ne donne clairement pas envie d’aller faire un tour à Angoulême.

Les cactus

Sans doute êtes vous déjà passé devant une entrée d’immeuble avec un joli bac rempli de cactus ou de faux galets ? Eh bien si vous pensiez que c’était purement décoratif vous vous fourrez le doigt dans l’œil. Ces bacs sont en fait l’un des dispositifs les plus discrets et les plus connus pour empêcher les SDF de piquer un somme devant votre porte d’immeuble, à l’abri du vent et de la pluie.

Crédits photo : Streetpress

Les pics

Le même concept que les cactus, mais pour le coup en beaucoup beaucoup moins discret. En juin dernier, des pics installés devant un immeuble londonien avaient d’ailleurs fait scandale sur Twitter, avant d’être retirés par les copropriétaires sur demande du maire de Londres. Reste que les associations spécialisées dans la protection des sans-abris recensent des milliers de ces pics un peu partout à travers le monde. Il y a encore pas mal de boulot donc !

Les plots

Moins pervers que les cactus, moins agressifs que les pics, les plots que vous voyez généralement sur les rebords de fenêtres des banques et autres commerces ont la même vocation que les deux réjouissances précédemment citées. La seule différence c’est qu’en plus d’être moches, ils n’arrivent même pas à remplir leur fonction première, à savoir empêcher les SDF de s’installer. En effet, comme le rapporte Streetpress, les sans-abris étant généralement pas bien gros et habitués à dormir dans des endroits assez peu confortables, ils n’ont aucun problème à se faufiler entre les fameux plots. Et bim dans les dents les méchants.

Crédits photo : Streetpress

Les accoudoirs (discrets, mais efficaces)

Le procédé est assez simple : vous prenez un banc normal, du type banc de métro ou de jardin public, et vous y ajoutez un bon gros accoudoir en plein milieu. Les gens qui ne se sentent pas concernés se diront « oh chouette un accoudoir pour m’accouder, c’est justement ce qui manquait à ce banc », et les SDF eux ne pourront plus s’allonger à moins de faire 80 cm de haut, ce qui même avec un gros coup de pute de la génétique reste quand même assez rare. C’est beau l’entraide et la solidarité.

Crédits photo : Streetpress

Les sprays anti SDF

Souvenez-vous, c’était en 2007, le maire d’Argenteuil Georges Mothron avait alors jugé bon d’acheter des caisses de Malodore, un répulsif très puissant censé repousser les sans domicile fixe et donc les empêcher de squatter dans sa ville. Choqués par ce dispositif ultra-dégradant, les agents municipaux avaient heureusement refusé de diffuser le répulsif dans les lieux publics et alerté la presse. Notez tout de même que Malodore était également très dangereux pour la santé, mais bon on n’est plus à ça près.

Les bancs inclinés

Où que vous soyez, en vous baladant, jetez un coup d’œil aux bancs : vous remarquerez souvent qu’ils sont très légèrement inclinés. À vous, ça ne changera pas grand-chose (à part que c’est quand même pas mal moins confortable qu’un banc normal et que ça pète un peu le dos), mais les SDF eux ne pourront pas s’y installer pour dormir sous peine de glisser toutes les trois minutes. Et voilà comment ils se retrouvent contraints de pioncer sur le trottoir, au mieux dans un sac de couchage, au pire entre deux cartons.

Ces petits jalons mignonnets pile bien espacés pour empêcher d'être bien assis ou allongé

Clap clap clap.

Un joli design de banc

Le côté bien courbé assure un maintien particulièrement pas confortable quand on dort dans le froid.

De chics bâtonnets blancs

Franchement, il suffit de poser une planche dessus et un matelas et ça gère. Voilà ce que je propose comme mesure de contournement des mesures anti-SDF. Tel est pris qui croyait prendre.

Dans la série : gros bordel on fout n'importe quoi ça passera crème

Non seulement c’est horribles mais en plus c’est moche.

Des belles bouboules

Eh non, ce n’est parce que le design est inventif qu’il est excusable !

En mode passif-agressif

Non en fait juste agressif.

Les lois à la con

Comme à Orlando en Floride (USA) où il interdit depuis 2011 d’organiser des distributions de bouffe lorsque ça rassemble plus de 25 personnes. Et où la mairie n’autorise que quatre distributions par an pour chaque association (parce qu’il faudrait pas non plus trop leur donner aux pauvres hein, sinon ils vont s’habituer). Ou à Santa Cruz en Californie, où comme dans beaucoup d’autres villes à travers le monde il est tout simplement interdit de dormir dans la rue. Parce que c’est vraiment qu’en général c’est un choix : « Ah tiens ce soir est-ce que je dors dans mon lit king size super confortable ou plutôt dans la rue ? Allez, dehors ça changera et puis comme ça j’attraperai la crève, on va bien se marrer. »

S’allonger pour dormir : ils ont quand même des goûts de luxe, eux. Heureusement, les SDF ont de l’humour et ils l’affichent sur des pancartes.