Depuis quelques semaines, les scandales sanitaires d’origine alimentaire se suivent et se ressemblent en France. Début avril, deux enfants sont décédés, contaminés par la bactérie E. Coli après avoir consommé une célèbre marque de pizzas surgelées. Juste après, c’est le coup de massue : la grande majorité de nos chocolats prefs quittent les rayons de nos supermarchés après de nombreux cas de Salmonelles. Bref, les scandales sanitaires sont malheureusement assez courants, mais certains ont été particulièrement violents… Ça fait froid dans le dos.

L'affaire du Colonia High School du New Jersey

C’est la toute dernière actu glaçante en termes de scandale sanitaire : une centaine de cas de tumeurs cérébrales, dont des glioblastomes (la forme la plus agressive du cancer du cerveau), ont été recensées dans ce lycée du New Jersey. Al Lupiano, un ancien étudiant, désormais spécialiste de l’environnement qui a lui-même contracté la maladie, ne voit qu’une explication : les facteurs environnementaux. Pour lui, c’est l’usine qui exploitait du minerai d’uranium à quelques kilomètres de l’école, entre les années 1940 et 1967, qui pourrait être responsable. Une enquête en ce sens est ouverte.

Le scandale de l'amiante

Après la Seconde guerre mondiale et jusqu’à son interdiction en 1997, l’amiante a été abondamment utilisé dans la construction en France, notamment pour ses vertus isolantes, malgré la connaissance de sa dangerosité et de son caractère cancérigène. En 2005, un rapport du Sénat estime à 35 000 le nombre de décès lié à utilisation entre 1965 et 1995, et à 100 000 d’ici à 2025. De son côté, en 2015, l’Institut national de veille sanitaire (InvS) révèle que le matériau serait responsable d’environ 2 200 nouveaux cas de cancers. En 2000, l’État est pour la toute première fois directement mis en cause : il est reconnu « responsable des conséquences dommageables du décès » de quatre personnes contaminées par le tribunal administratif de Marseille.

Le Chlordécone

Le chlordécone est un insecticide, largement utilisé dans les bananeraies de Martinique et de Guadeloupe, de 1973 à 1993. Son objectif : lutter contre le charançon de la banane. Entre 2004 et 2007, une étude est menée par le Pr Pascal Blanchet (CHU de Pointe-à-Pitre) et le Dr Luc Multinger (Inserm) sur les effets de ce produit. Résultat : ils confirment dans le Journal of Clinical Oncology que le Chlordécone est responsable d’une augmentation significative des risques de cancer de la prostate. Les hommes exposés auraient 80% de risques en plus de développer la maladie. Aujourd’hui, les deux îles présentent un taux d’incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde.

Le scandale du lait frélaté

Un scandale qui a secoué le monde, et plus particulièrement la Chine, pendant 10 mois en 2008. Une vingtaine d’entreprises, dont le puissant groupe agroalimentaire chinois Sanlu, sont accusé d’être responsable de la mort de six enfants et de 300 000 malades. Mis en cause : la présence de mélanine dans le lait en poudre. Ce produit chimique, utilisé pour donner de la consistance au lait, mais aussi dans la fabrication de colle et de plastique, pourrait provoquer des calculs rénaux. Comme si ce n’était pas déjà assez glauque comme ça : le puissant agroalimentaire a d’abord étouffé les plaintes et continué la distribution de son lait. Quatre personnes auraient été condamnées à mort ou à perpétuité dans ce scandale largement censuré, et deux auraient déjà été exécutées… Voilà, j’ai bien plombé l’ambiance là, non ? (Source.)

Crédits photo (CC BY 2.0) : Marc van der Chijs

Le scandale de l'huile frélatée

Puisqu’on est sur la lancée des produits « frelatés », sachez que cela se traduit par « des produits altérés dans leur pureté ». Définition faite, nous pouvons poursuivre. Ce scandale de 1981, qui a fait plus de 20 600 victimes en Espagne, dont 370 à 835 morts, est une catastrophe sanitaire d’origine industrielle. Dès 1981, les autorités espagnoles attribuent la catastrophe aux huiles dénaturées. Deux ans plus tard, la responsabilité de ces dernières est reconnue lors d’une conférence à Madrid. On parle alors de « syndrome de l’huile toxique ». L’OMS établit ensuite une forte corrélation entre la consommation de ces huiles et le syndrome. En revanche, les agents étiologiques exacts n’ont pas pu être identifiés avec certitude. En ce sens, une enquête de Courrier Internationale dénonce, elle, d’autres responsables : les organophosphates. L’article accuse le gouvernement d’avoir étouffé l’affaire et fait porter le chapeau aux huiles pour éviter, notamment, de grosses pertes économiques.

Crédits photo (CC BY-SA 3.0) : España-loc.svg: Miguillen

La crise de la vache folle

C’était il y a 26 ans. Le 28 février 1991, le premier cas français d’encéphalopathie spongiforme bovine est identifié. Il s’agit d’une maladie neurodégénérative qui touche les bovins, et qui serait transmise par les farines animales utilisées pour l’alimentation des bovins et qui peut… Se transmettre à l’homme. Malheureusement, c’est ce qu’il se passe. Au 24 janvier 2017, on comptait 223 victimes humaines de la maladie de Creutzfeldt-Jakobdans dans le monde, dont 177 au Royaume-Uni et 27 en France. Des millions de bovins ont également été abattus.

La crise de la dioxine

À la rubrique des bonnes grosses merdes sanitaires déclenchées par les farines animales : la crise de la dioxine. Ce scandale alimentaire a explosé en Belgique en 1999, après la découverte de (accrochez-vous) polychlorodibenzo-p-dioxine dans ces farines, utilisées pour nourrir les poulets. Pour lutter contre, diverses mesures sont prises parmi lesquelles : l’abattage de 7 millions de poulets et 60 000 porcs. En 2015, Nik Van Larebeke de l’Université de Gand, qui étudie les conséquences de la crise, annonce avoir relevé 20 000 cas de cancer supplémentaires chez les femmes, 22 000 cas de diabète et 24 000 cas d’hypertension.

La crise du concombre

Aussi connue sous le nom vachement plus simple de « épidémie de gastro-entérite et de syndrome hémolytique et urémique de 2011 en Europe ». Comprenez donc que nous parlerons ici de « crise du concombre », pour une question de lourdeur du texte. En 2011, une épidémie due à la bactérie Escherichia coli 0104:H4 (que nous appellerons « E. Coli », pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment), commence en Allemagne à la mi-mai. Responsables : des graines germées issues de l’agriculture bio. Conséquences (dramatiques) : 53 morts. C’est l’épidémie de ce type la plus importante connue. Elle a aussi déclenché une grave crise économique dans la filière agricole espagnole puis dans tous les pays européens.

Crédits photo (CC0 1.0) : Jan Fredrik Breivik

La grippe aviaire

Comment parler de poulets sans rebondir sur la grippe aviaire ? Et il faut dire que vis-à-vis de cette maladie, on est toujours dans la sauce… Il y a quelques jours à peine, six nouveaux foyers de la maladie étaient découverts en Dordogne. La « Grippe aviaire » désigne les différentes formes de la maladie causée par le virus de la grippe, et qui infecte les oiseaux, sauvages comme domestiques. On parle aussi d’influenza aviaire. En 2004, une souche H5N1 du virus inquiète à cause de sa possible transmission à l’homme. Entre 2004 et 2005, on compte 59 décès liés à la maladie.

Affaire de la poudre Baumol

Il s’agit ici d’un scandale sanitaire d’autant plus triste qu’il touche des nourrissons… En 1952, ce talc pour bébé est contaminé par un dérivé… d’arsenic. Le roi des poisons est versé en lieu et place d’oxyde de zinc dans la préparation. Un acte non intentionnel, mais mortel. Dans cette terrible affaire, 82 bébés sont décédés. Le fabricant, Jacques Cazenave, est condamné 7 ans plus tard à… 18 mois de prison avec sursis.

Une histoire bien glauque, qui nous fait immédiatement penser à l’affaire du talc Morhange. Dans les années 1970, 36 enfants trouvent la mort et 168 autres sont intoxiqués par cette poudre. Puisque l’affaire semble tristement calquée sur la précédente : 38 kilos d’hexachlorophène, bactéricide puissant et hautement toxique, ont été mélangés à 600 kilos de talc, par inadvertance.

Les Radium Girls

En 1917, plusieurs jeunes femmes sont embauchées par l’US Radium Corporation à Newark (New Jersey) pour peindre à la peinture luminescente des cadrans de montre et d’instruments aéronautique au radium. Phénomène chelou : elles se mettent à briller. Littéralement. Leurs vêtements, cheveux et peau luisent dans le noir. En réalité, en s’exposant au radium, elles ont reçu de fortes doses de rayonnement ionisant. Conséquences de cette exposition : elles sont nombreuses à avoir souffert d’anémie, de fractures osseuses, de nécrose de la mâchoire et de tumeurs cancéreuses des os (ostéosarcomes). Certaines en sont décédées.

Crédits photo (Domaine Public) : Toxicotravail~commonswiki

Love Canal

« Love Canal » est une banlieue de Niagara Falls. Son nom vient de l’entrepreneur William Love qui y fit creuser un canal à la fin du XIXe. Le projet est finalement avorté, laissant un fossé de 1000 m de long. Le terrain est finalement racheté en 1941 par la compagnie Hooker Chemical, qui y rejette… 22 000 tonnes de produits toxiques. En 1953, l’entreprise ferme, et le terrain devient une petite ville, avec des écoles et de jolies maisons résidentielles. Dans les années 1970, le scandale éclate : les sols sont imprégnés de ces produits toxiques qui remontent en surface. L’eau change de couleur, les sous-sols sentent mauvais, les animaux de compagnie et les oiseaux meurent en nombre colossal, les nourrissons naissent avec de nombreuses malformations… 950 familles sont alors évacuées. Cette crise environnementale et sanitaire donne à la ville un triste record : la plupart des résidents n’ont pas vécu au-delà de 50 ans.

Crédits photo (Domaine Public) : Ubcule

Des histoires à ne surtout pas confondre avec les plus gros scandales pharmaceutiques de l’Histoire. C’est pas pareil, mais c’est tout aussi horrible.