Tout comme les véritables histoires de Disney qui en ont été adaptés, les comptines pour enfants sont loin d’être aussi « tout public » que ce que l’on pourrait s’imaginer. Du cul, du cul, du cul, des morts, du cul : les thèmes sont un peu toujours les mêmes, et un peu toujours glauques. Voici quelques exemples histoire de vous remettre un peu la tête sur les épaules.

Au clair de la lune

Cette célèbre chanson du XVIIIe siècle parle de prostitution : le personnage est en quête d’une bonne âme pour rallumer le feu de sa chandelle morte. Et au cas où vous n’auriez pas compris, quand on dit chandelle, on ne parle d’une jolie petite bougie parfumée au cèdre des bois, mais de la grosse chandelle qu’il cache dans son pantalon. Tout d’un coup « ma chandelle est morte, je n’ai plus de feu » prend un tout autre sens n’est-ce pas.

Il court, il court le furet

Sous ses airs de petites innocentes, cette chanson cache l’une des plus célèbres contrepèteries anticléricales de la langue française. En effet, on mélange un peu les lettres, et hop « Il court, il court le furet » devient « Il fourre, il fourre, le curé ». Et voilà ce qu’on apprend à nos enfants !

A la pêche aux moules

« À la pêche aux moules, moules, moules, je n’veux plus y aller maman. […] Sont-ils de bons enfants, quand une fois ils vous tiennent, tiennent, tiennent. Sont-ils de bons enfants, ils vous font des petites caresses. » Ça ressemble quand même à s’y méprendre à un viol cette histoire.

Une souris verte

La comptine nous paraissait déjà un peu barbare quand c’était une souris qu’on trempait dans l’huile, dans l’eau et tout le tintouin, nous sommes donc un poil choqués d’apprendre que la souris est en fait une métaphore pour un pauvre soldat vendéen capturé par les Républicains et lamentablement torturé.

Nous n'irons plus au bois

Une chanson qui était drôlement d’actualité au moment où elle est sortie puisqu’elle évoquait de façon très claire la fermeture des maisons closes par le bon roi Louis XIV. Maisons closes dont la porte était toujours surmontée de lauriers (d’où la phrase « Nous n’irons plus au bois, les lauriers sont coupés »).

A la claire fontaine

« C’est de mon ami Pierre, qui ne veut plus m’aimer, pour un bouton de rose, que je lui refusai. » Il n’y a clairement pas besoin d’avoir fait polytechnique pour comprendre que Pierre voulait tremper sa nouille et que la malheureuse qui a refusé s’est fait traiter plus bas que terre. Une image de la femme moderne et égalitaire, c’est génial.

Jean Petit qui danse

Si elle est bien pratique pour apprendre les parties du corps aux enfants, la comptine a des origines bien glauques. En effet, Jean Petit fut, en 1643, l’un des deux chefs de file de la révolte des croquants du Bas-Rouergue. Cette chanson décrit dans le détail la façon dont il a été roué en place publique.

Il était un p'tit cordonnier

Une sympathique petite chanson familiale où l’on vous apprend qu’il est tout à fait normal de frapper (un peu mais pas trop hein) votre femme après une longue journée de boulot. Parce que bon, quand même, il faut bien qu’elle serve à quelque chose la bougresse. Je cite « Quand à la maison il rentrait, sa petite femme il battait. Il la battait si juste qu’il n’y avait rien de plus juste ». Il la battait tout drêt pas plus qu’il n’en fallait. » Mais heureusement, « le soir pour la consoler, sa petite femme il embrassait. » OUUUF.

C'est la mère Michel

Vous pensiez qu’elle avait perdu son chat ? Eh bah non : la vérité c’est qu’elle a perdu sa chatte, et donc, par extension, sa virginité. Elle a la cuisse légère la mère Michou.

Ne pleure pas Jeannette

Jeannette pleure parce que le mec qu’elle aime est en taule et va être pendu, et comme ils en ont plein le baba de l’entendre chouiner toute la journée et bah ils décident de la pendre avec son keum. En même temps c’est vrai que c’est important de confronter les enfants à la réalité des choses.

Gentil Coquelicot

Gentil coquelicot mesdames, gentil coquelicot nouveau ». Jusque là, tout est beau. Puis « un rossignol vint sur ma main, et me dit trois mots en latin ». Et là, l’oiseau lui balance sans qu’on lui ait rien demandé « Que les hommes ne valent rien ». Bim, prenez-vous ça dans la tronche messieurs, c’est cadeau ! « Des femmes, il ne me dit rien ». Les femmes ne méritent même pas qu’il s’y attarde, puisque cet oiseau a un penchant pour les demoiselles : « Des demoiselles beaucoup de bien ». On est d’accord que c’est pas la pire mais quand même c’est pas terrible.

Dansons la capucine

« Dansons la Capucine, Y a pas de pain chez nous, Y en a chez la voisine mais ce n’est pas pour nous ». La comptine parle de pauvres enfants qui n’ont ni pain, ni vin, ni lait, ni bonbon – rien en somme – et qui envient leur voisine de posséder toutes ces choses appétissantes. Hâte de la prochaine comptine où les enfants vont au restos du coeur.

Il était une bergère

Cette comptine parle non seulement de la mise à mort d’un animal dont le seul crime est d’avoir trempé sa patte dans du fromage « Si tu y mets la patte, Tu auras du bâton, ron ron, Il n’y mis pas la patte, Il y mis le menton, ron ron, La bergère en colère, Tua son p’tit chaton, ron ron ». Et quand celle-ci vient se confesser auprès d’un curé pour son crime, celui-ci profite allègrement de la situation. « Ma fille pour pénitence, Et ron, et ron, petit patapon, Ma fille pour pénitence, Nous nous embrasserons (…) La pénitence étant si douce, Nous recommencerons ».

Il était un petit navire

Non cette chanson ne parle pas d’un gentil bateau qui n’avait « ja-ja-jamais navigué » mais d’un jeune matelot qui, après un tirage à la courte paille, doit être mangé par l’équipage d’un petit navire qui n’a plus de vivres. Les matelots réfléchissent à la sauce et à la manière de le préparer (fricassé, frit). Après une prière du mousse à la Vierge Marie sa patronne, des milliers de petits poissons sautent dans le navire, sauvant l’enfant au dernier moment. C’est donc une comptine sur le cannibalisme.

Il pleut, il pleut bergère

Loin de suggèrer l’image paisible d’une bergère tentant de rentrer ses moutons au plus vite pour éviter la pluie, Il pleut, il pleut, bergère aurait été chantée au lendemain de la prise de la Bastille en juillet 1789, lors de la création de la garde nationale ; la bergère serait la reine Marie-Antoinette d’Autriche et l’orage dont il est question dès la première strophe renverrait aux troubles révolutionnaires. Son auteur l’aurait fredonnée quelques années plus tard en montant à l’échafaud. Trop mignon.

Et voilà comment on a envoyé des générations d’enfants en psychanalyse.

Pour continuer à pourrir votre innocence, voilà les histoires glauques derrière les personnages de dessins animés, les histoires glauques qui ont eu lieu à Noël, et les références glauques cachées dans des Disney. Oui c’est très glauque tout ça.