Supprimés en 2016 car estimés trop peu rentables, les trains de nuit pourraient faire prochainement leur come-back. Une idée mise sur les rails notamment par les Verts qui y voient un moyen moins énergivore de se déplacer. Ce sera aussi l’occasion de renouer avec des souvenirs et des émotions que l’on croyait ne jamais plus revivre.

L’art de voyager lentement

Jean Cocteau a écrit que l’âme voyageait moins vite que le corps. En vrai, c’était beaucoup plus conceptuel que ça, mais passons. Par exemple, voyager en train de nuit, c’était prendre le temps de le ralentir, de voir défiler les minutes et les paysages. Une parenthèse où l’instant était un présent, et où l’esprit, entre deux destinations, pouvaient appuyer sur pause pour faire le point, ou prendre le temps de ne penser à rien.

Le Séphora des odeurs corporelles

Chaque trajet était l’occasion de découvrir de nouveaux voisins de couchettes et d’enrichir ainsi notre catalogue olfactif. La truffe aiguisée par ces odeurs familières, on se laissait bercer par les effluves de Drakkar noir luttant péniblement contre l’aigreur d’aisselles abandonnées par un déo à bout de souffle, alors qu’au petit-matin, les haleines pâteuses chargées par une nuit mal ventilée achevaient de nous réveiller. Vraiment dommage qu’on n’ait jamais pu repartir avec des échantillons de ces fragrances !

Un réseau social avant l’heure

Les trains couchettes étaient un lieu de vie et d’avis, où l’on pouvait refaire le monde, ou juste un petit bout, avec un voisin de compartiment, en pleine nuit entre Rocamadour et Padirac. Les trains couchettes, c’était le monde de la nuit sans le strass et les paillettes. On se sentait embarqué dans une même aventure, poussé au moins à faire bonne figure, voire à nouer de nouvelles amitiés, pour la vie ou, plus vraisemblablement pour la nuit. Et au petit matin, chacun descendait sur le quai comme on reprend son train-train quotidien.

Ne dormir que d'un oeil

Si les voyageurs des trains couchettes avaient souvent les yeux éclatés en arrivant à destination, c’était souvent parce qu’ils ne fermaient jamais vraiment les deux en même temps. Chaque arrêt en gare, chaque envie pressante d’un voisin de compartiment, chaque passager se trompant de cabine, nous réveillait en sursaut, jusqu’à ce que le contrôleur vienne achever notre sommeil avec l’annonce de notre prochaine arrivée.

Les compartiments transformés en soirée privée

Les trains de nuit pouvaient aussi parfois accueillir des carrés VIP improvisés où de jeunes fêtards s’encanaillaient jusqu’au milieu de la nuit au grand dam de certains passagers, quand d’autres trouvaient là l’occasion de passer le temps en se joignant à la parade.

Faire la queue en pyjama dans le couloir pour les toilettes

A chaque voyage en train de nuit, c’était un défilé dans le couloir, de pyjamas et de trousses de toilette. Les plus patients attendaient leur tour devant la porte des WC/Salle d’eau, pendant que les autres multipliaient les allers-retours depuis leur compartiment. Sortir la nuit pour aller aux toilettes était une aventure qu’on tentait de repousser jusqu’au petit-matin, par flemme de traverser tout le wagon à moitié dans le noir avec le risque au retour de se planter de compartiment.

La bagarre pour la couchette du haut...

La couchette du bas a toujours été celle du con. En plus d’être aux premières loges des odeurs des pompes des autres passagers, vous pouviez être sûr de vous faire marcher dessus lors d’une sortie nocturne de votre voisin du dessus. Sans parler de toutes les saloperies (biscuits, crottes de nez, kleenex…) qui tombaient du lit de ce dernier pour finir sur votre drap.

… à moins que ce ne soit pour la couchette du bas !

Et puis il y a ceux qui préfèraient rester le plus près possible du plancher des vaches pour ne pas avoir à escalader d’échelle pour se (re)coucher en pleine nuit, ou, paraît-il aussi, afin de moins ressentir les vibrations et le roulis du train.

Refiler sa crève et tout un tas de saloperies à ses compagnons de voyage

Les trains de nuit étaient l’incarnation du communisme. Un lieu de vie où tout ce qui était à moi était à toi et inversement… y compris les morbacs, les virus et autres bactéries qu’on refilait gaiement à nos voisins et ceux qui nous succéderaient. Pas si sûr donc qu’ils retrouvent leur mojo tout de suite tout de suite.

Faire un Tetris avec ses bagages

Les mecs de la SNCF qui ont imaginé les trains couchettes ont oublié un léger détail : le rangement pour les bagages ! Et on ne parle même pas des voyageurs trimbalant leur matos pour le ski… Même en temps normal, les compartiments se transformaient rapidement en capharnaüm avec une sorte de Tetris de valises entremêlés avec des sacs et quelques bras pour tenir l’ensemble.

Et figurez-vous qu’on a aussi les meilleurs tweets sur les voyages en train.