Certains bâtiments deviennent célèbres pour leur forme, d’autres pour leur histoire. C’est le cas de la tour de Ponte City située à Johannesbourg en Afrique du Sud qui, depuis sa création dans les années 70 est accompagnée d’une réputation sulfureuse. On l’a appelée « la tour la plus dangereuse du monde » ou « la tour de l’apocalypse », mais comment la tour d’habitation la plus haute d’Afrique, plutôt cotée à sa construction a rapidement basculé dans le sordide avant de tenter de renaitre plusieurs fois de ses cendres ? C’est ce qu’on vous propose de voir tout de suite.

Un projet titanesque

À l’époque de sa construction dans les années 70 à Johannesbourg en Afrique du Sud, la tour de Ponte City est un chantier colossal nécessitant plusieurs millions de dollars de construction. Au départ c’est un bâtiment supposé attirer la richesse de la ville grâce à la vue panoramique qu’elle offre sur tout Johannesbourg, sans parler du fait qu’elle est réservée aux blancs en cette époque d’apartheid, un argument de poids pour la clientèle qu’elle cible. De l’extérieur elle reste cependant dégueulasse, le magazine Vanity Fair n’hésitant pas à la classer en deuxième place des bâtiments les plus laids de la ville.

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"*TUIUIUIUIUIU* Oui allô ? / Oui ce serait pour signaler un lien disparu / Ok on envoie nos équipes d'enquêteurs sur le coup"

Une tour qu'on ne quitte plus

À la base, le projet est un symbole d’outrance, on y trouve aux derniers étages d’immenses lofts et appartements luxueux pour les plus riches et des appartements plus « modestes » à mesure qu’on descend les 54 étages. L’idée est même de pouvoir y vivre sans avoir besoin d’en sortir puisqu’on y a installé des salles de sport, des cafés, une piscine et plusieurs commerces pour faire ses courses en ayant simplement à utiliser l’un des huit ascenseurs pour que les habitants des 467 appartements puissent vivre la grande vie sans quitter les lieux.

Le symbole d'une société raciste

Les seules personnes noires à être autorisées à l’intérieur du bâtiment sont évidemment les employés. Ils ont leurs propres toilettes, doivent rester discrets en toutes circonstances et sont logés sur le toit loin du regard des riches habitants blancs. Il est par exemple inscrit sur le contrat du gardien de la piscine qu’il lui est interdit de regarder les femmes blanches en maillot de bain. Un bâtiment somme toute moins dégueulasse que les gens qui l’ont érigé.

Les émeutes de Soweto de 1976, la fin précipitée du symbole raciste d'un pays ségrégationniste

Si la tour achevée en 1975 est donc entièrement habitée par des blancs dans un pays dirigé par le racisme, les émeutes de Soweto de 1976 changent radicalement la donne à peine un an après son ouverture. En peu de temps les blancs déménagent et abandonnent leurs logements ainsi que le quartier d’Hillbrow alors que la tour est squattée par des réfugiés venus de plusieurs pays voisins. En peu de temps, la tour devient un véritable bidonville habité par plus de 10 000 personnes, soit 6 500 de plus que la capacité d’habitation décidée à la construction qui était de 2 500 personnes.

La "tour du vice"

Des années 80 aux années 90, la tour devient le symbole du vice et de la criminalité dans la ville, de même que le quartier d’Hillbrow au milieu duquel elle trône. On y trouve plusieurs gangs, du trafic de drogue, de la prostitution en masse, des crimes et délits en tout genres et certaines rumeurs vont jusqu’à dire que plusieurs corps sont retrouvés dans l’immeuble au fil des années, victimes de meurtres ou personnes suicidées.

Le lieu devient surtout la source de plusieurs fantasmes plus ou moins exagérés, certains habitants attestant qu’on y trouvait des étages carrément réhabilités en centres de prostitution et beaucoup d’histoires étant purement inventées par un peuple raciste se sentant chassé de son paradis perdu. Évidemment, la tour a été pendant une longue période l’épicentre de la criminalité de la ville, mais il est compliqué de démêler le vrai du faux sur toutes les histoires sordides qui l’accompagnent.

Crédits photo (CC BY 2.5) : Kemptonreporter

2001 : Un premier projet de rénovation

La société Kempston Group rachète la tour en 2001 pour se lancer dans un colossal projet de rénovation et de réhabilitation. Pendant plusieurs années les travaux avancent doucement mais surement, la taille du bâtiment n’aidant pas forcément à faire des travaux simplement et rapidement. À peine trois ans plus tôt, la ville réfléchissait même à transformer la tour en prison, ce qui vous donne une idée de comment le bâtiment était considéré par la municipalité.

Arrêt du chantier, et nouvel espoir grâce à la Coupe du Monde de football de 2010

À l’approche de la coupe du monde de football de 2010, plusieurs promoteurs immobiliers investissent dans la tour pour reprendre les travaux précédemment mis en pause et vident plusieurs appartements pendant l’année 2007. On réinvestit un monstrueux paquet de pognon pour transformer l’immeuble en ce qu’il devait être à la base : un complexe de résidences de luxe, en oubliant cependant (et heureusement) le côté raciste du projet. La crise financière de 2008 apporte cependant un coup fatal au projet qui est de nouveau mis à l’arrêt.

2011 : Un dernier projet de rénovation

Finalement la société Kempston Group reprend dix ans plus tard les travaux précédemment commencés en 2001. La rénovation est colossale puisqu’il faut remettre à neuf les 54 étages, le système de plomberie, d’électricité, les huit ascenseurs et globalement tout l’intérieur laissé en l’état pendant les précédents travaux. Aujourd’hui la tour a entièrement été réhabilitée et on y compte plus de 3000 habitants de classe moyenne. Elle n’est plus le symbole du vice ou de la décadence qu’elle a pu être dans les années 90 et une exposition rétrospective de son histoire y a même été installée.

Un studio de cinéma plus vrai que nature

Au fur et à mesure de son existence, la tour a été le théâtre de plusieurs tournages de films comme Dangerous Ground en 1997, à son époque la moins sécurisée. Plus tard c’est le réalisateur Neil Bloomkamp qui a choisi la tour pour y tourner quelques scènes de ses films District 9 et Chappie. Ce sont véritablement les tournages de films apocalyptiques ou de guerre lui ont valu le nom de tour de l’apocalypse.

Et si comme ce symbole affligeant de l’Apartheid, vous aimez les lieux avec des histoires assez étonnantes, on vous conseille d’aller voir les trucs à savoir sur Action Park, un genre d’enfer sur Terre.

Sources : Fredzone, Toute la culture, Le Monde, 24 heures, Wikipédia.