Il y a des gens qui ont du talent, c’est indéniable, mais quel meilleur talent que celui qu’on met au service de l’argent ? Aucun, c’est en tout cas ce que j’ai entendu dans un cours de commerce. C’est pour ça que des gens qu’on appelle des faussaires utilisent littéralement leur art pour copier, reproduire et falsifier des choses dans le noble but de se faire des grosses thunes. Tableaux de maitre, argent, chèques, timbres… Il y a des copieurs pour chaque artefact qui pourrait se vendre et c’est ce qui fait la beauté de notre monde, beaucoup plus que le sourire d’un enfant ou qu’un coucher de soleil dans le Lavandou.

David Stein

Non seulement David Stein était tellement prolifique qu’il a utilisé plus d’une quinzaine de pseudonymes au cours de sa carrière mais en plus il avait le culot de copier des artistes contemporains de son époque : il produisait donc des Andy Warhol ou des Henri Matisse de leur vivant et c’est d’ailleurs comme ça qu’il s’est fait niquer.

Un jour le peintre Marc Chagall entre dans une galerie à New-York et tombe sur des tableaux signés de son nom qu’il n’avait pas peint, ce qui mène rapidement à l’arrestation de Stein. Le monsieur a eu une vie mouvementée et plusieurs périodes où il a été obligé de changer de pays avant de mourir dans les années 80 en laissant de faux tableaux dans la nature. Je veux dire littéralement dans la nature, j’en ai vu un sur un chemin en faisant une rando la dernière fois.

Han van Meegeren

Alors qu’il était en procès et encourait la peine de mort pour avoir vendu des tableaux des Pays-Bas aux nazis pendant la deuxième guerre mondiale, Meegeren a bluffé tout le monde dans la salle d’audience en déclarant que les tableaux vendus étaient des faux et qu’il les avait peint lui même afin d’entuber les nazis.

Évidemment ce jour-là personne ne l’a cru dans la salle, les reproductions de Vermeer semblant bien réelles. Du coup l’accusé a demandé un tableau vierge et a commencé à peindre devant l’audience pour prouver qu’il était l’auteur des faux, ramenant sa peine de mort à seulement un an de prison (qu’il n’a pas purgé parce qu’il est mort d’une maladie avant).

Crédits photo (Creative Commons) : Photographer Koos Raucamp

Tony Tetro

Passionné de plusieurs maitres, Tetro a copié leur style pour se faire plaisir, c’était son petit passe temps. Et pour un petit gars qui n’a jamais étudié l’art il avait un sacré coup de pinceau je peux vous le dire (à lire avec l’accent d’un tenancier de bar des années 50). Il a donc commencé à travailler sa technique de copie puis a revendu ses tableaux au départ sans mentir sur leur authenticité puis a rejoint un petit réseau de revente pour entuber du gros riche, parce que ça payait mieux. Il a finalement été démasqué et a passé un an en prison, s’en tirant plutôt pas trop mal par rapport à d’autres faussaires.

Helene et Wolfgang Beltracchi

Le couple Beltracchi fait partie des grosses pointures de l’arnaque, leurs ventes ayant rapporté jusqu’à 50 millions de dollars selon certaines estimations. Là où le couple était vraiment fort c’est qu’il ne copiait pas des oeuvres existantes mais en créait des originales en imitant la main de certains artistes tout en leur inventant une histoire et un contexte.

Ils ont même réussi un jour à piéger l’expert réputé le plus coriace en imitant le trait du peintre Max Ernst, le fameux expert serait sorti de chez eux en déclarant qu’il s’agissait de la plus belle pièce de l’artiste. Des génies du crime qui se sont fait avoir quand on a trouvé dans l’une de leurs peintures un pigment qui n’existait pas à l’époque du peintre copié. Et aussi sur un tableau Wolfgang avait rajouté un pokemon une fois, c’était pas crédible.

Crédits photo (Creative Commons) : Max Ernst

John Drewe et John Myatt

Ces deux loustics étaient devenus des faussaires et arnaqueurs hors pairs : Myatt peignait en imitant certains maitres et Drewe s’occupait de faire des faux documents pour les rendre authentiques. Mais là où ils ont vraiment fait preuve de génie c’est quand Drewe a créé une société d’expertise : il n’y avait plus aucun problème pour attester de l’authenticité des faux que réalisait Myatt. Ils ont finalement été arrêtés parce qu’ils devenaient un peu trop gourmands, Drewe a continué à baigner dans l’arnaque après son séjour en prison et Myatt s’est rangé.

Fernand Legros

Ou comme l’appelaient certains de ses victimes Legros bâtard. Fernand Legros n’était pas peintre mais savait comment embrouiller les gens et pendant une dizaine d’années il a monté une belle escroquerie de vente de faux tableaux à des Américains. Il bossait avec deux peintres qui s’occupaient de fournir les fausses toiles pendant que lui sympathisait avec les descendants des artistes ou des experts pour obtenir de leur part des certificats d’authenticité.

Soit il les arrosait (d’argent, pas d’eau, sinon ce serait con), soit il les faisait boire en se montrant amical et ça marchait. Legros a réussi par ailleurs à faire authentifier un faux tableau au peintre Van Dongen qui a attesté qu’il était bien de lui, en profitant du vieil âge du peintre pour l’embrouiller. Un vrai de vrai.

Crédits photo : : DR

Guy Ribes

Né et élevé dans une maison close, Guy Ribes a été initié à la peinture dans l’internat où il a été placé quand ses parents proxénètes ont été arrêtés après la fermeture de leur établissement. Il a commencé un peu plus tard une carrière de peintre puis a tenté de vendre ses oeuvres avant de copier certains artistes, s’approprier leur univers et leur trait tout en créant des oeuvres originales. Il est arrivé par exemple à piéger la fille de Marc Chagall qui a pris l’une de ses créations pour un tableau de son père.

Un véritable traffic s’est organisé autour des oeuvres de Guy qui sera finalement arrêté après des décennies d’activité. Lors de son procès le jury a reconnu son talent d’artiste, ne le décrivant pas comme un simple copieur, et même l’expert qui était interrogé a déclaré ne jamais avoir vu quelqu’un qui pouvait copier le style d’autant de peintres à la fois : « Si Picasso était encore vivant, il l’embaucherait ». Il peint depuis des oeuvres à son nom, principalement des paysages de Turquie exposés dans des kebabs.

Crédits photo (CC BY-SA 4.0) : Geoffrey Guerra

Shaun Greenhalgh

Déjà tout gamin Shaun Greenhalgh s’amusait à vendre sur les marchés des poteries qu’il réalisait en disant qu’il s’agissait d’antiquités, il était donc assez mal parti le petit (selon votre ordre de moral vous pouvez dire qu’il était bien parti). Il a ensuite commencé à copier des sculpteurs et des peintres pendant que toute sa famille prenait part à l’arnaque pour refourguer les oeuvres à des collectionneurs et des musées.

Le problème c’est qu’au fur et à mesure il s’attardait de moins en moins sur ses oeuvres et a commencé à devenir un peu moins précis, les erreurs se faisaient alors plus visibles sur les tableaux et les sculptures et on l’a donc choppé un beau matin. En vrai je sais pas si c’était un matin, et même s’il faisait beau, c’est juste une expression faites pas chier.

Crédits photo (CC BY-SA 4.0) : Geni Shaun Greenhalgh

Yves Chaudron

On arrive sur du faussaire tellement doué qu’on n’est même pas certain qu’il ait déjà existé. Yves Chaudron est le nom du faussaire qui aurait volé la Joconde et effectué des copies en 1911. Il a produit plusieurs fausses toiles de la Joconde et les a vendu a de naïfs Américains (à ne pas confondre avec des natifs Américains, ce peuple fier et ombrageux) jusqu’à ce que l’original soit retrouvé trois ans plus tard et remis dans le musée du Louvre. Ensuite on a jamais réellement ré-entendu parler de Chaudron, ce qui appuie la théorie selon laquelle il n’existe pas. Ou qu’il est mort. Ou qu’en fait c’était un rêve depuis le début.

Crédits photo (Domaine Public) : Auteur inconnuUnknown author

Tom Keating

Contrairement à de nombreux autres faussaires, Tom Keating copiait des oeuvres pour protester et non pour se faire un paquet de pognon. Il copiait des artistes et laissait délibérément des « erreurs » visibles uniquement par des experts pour qu’on comprenne qu’il s’agissait de faux. Pourquoi ? Pour faire chier les collectionneurs qui ne s’intéressaient aux tableaux que pour leur prix. Après son arrestation et sa mort les tableaux de Keating ont d’ailleurs gagné en cote, ce qui est assez paradoxal pour un type qui ne voulait pas que l’art soit défini par l’argent.

Crédits photo (Domaine Public) : Follower of Alfred Sisley

Et si vous aimez ce genre de sujets vous pouvez aller voir les systèmes d’arnaque les plus connus et les plus grosses arnaques de 2021, mais je vous conseille plus le premier vu qu’il est de moi.

Sources : Barnebys, Beaux Arts, HowStuffWorks, Guide Artistique, Artalistic, Money, Wikipedia.