On n’est pas certains certains que la prostitution soit le plus vieux métier du monde, mais une chose est sûre : ça existe quand même depuis un bon bout de temps. Si on ignore encore beaucoup de choses de ce métier, dont les tabous et secrets ne se lèvent que très lentement, on en sait encore moins sur les maisons closes, ces lieux dans lesquels certaines travaillaient (ou travaillent, selon les pays). Eh bah justement, ce top est là pour vous !

Sous Napoléon, les "maisons de plaisir" sont légalisées en France

Et avant ça, au XIIIe siècle (sous Louis IX), la tolérance envers la prostitution est proclamée, et des établissements se spécialisent dans le commerce charnel. Les volets étant constamment fermés, c’est une lanterne rouge qui signale l’ouverture du lieu au public. Les prostitués sont alors « assignés à résidence » : elles n’ont le droit de sortir que certains jours de la semaine, toujours accompagnée par des « sous-maîtresses » (c’est-à-dire, les tenancières).

Durant le règne de Louis XV, les maisons closes connaissent un franc succès. C’est à partir de 1770 que les contestations publiques se font de plus en plus nombreuses. Au même moment, le nombre de prostituées occasionnelles, travaillant sans intermédiaire, grandit. Ces éléments mènent au déclin des bordels.

La période révolutionnaire, elle, dépénalise la prostitution. Les « petits bordels » se multiplient alors. Un peu plus de 10 ans plus tard, en 1804, et sur ordre de Napoléon, le préfet de police de Paris (Dubois) prescrit l’organisation officielle des « maisons de plaisir ». À partir de là, les maisons closes et celles qui y travaillent sont contrôlées par « la brigade des mœurs ». En réalité, cette loi « tolérante » ne l’était pas vraiment : elle permettait de cacher les prostituées afin de » préserver la morale », à l’époque où la bourgeoisie rayonnait.

... Mais elles sont (vraiment) plus anciennes que ça

Dans la Grèce antique, déjà, on trouvait des maisons de prostitution ! Le législateur Solon (640 av. J.-C / 558 av. J.-C) les inaugure sous le nom de « dicterions ». On parle alors de « bordels étatiques », tenus par les « pornobosceions », eux-mêmes surveillés par des fonctionnaires. Ils sont d’abord établis dans les ports, pour les marins.

Dans la Rome antique aussi, la prostitution et la sexualité sont bien moins taboues qu’aujourd’hui. Après Domitien (51 – 96), les maisons closes (appelées « lupanars »), ouvrent. Elles sont généralement situées à proximité des casernes et des remparts. Pourquoi ? Eh bien, parce que celles qui y travaillent sont des esclaves féminines, destinées aux soldats. Ouais, pas ouf. Les filles de joie sont vêtues de vêtements jaunes, puisque cette couleur est celle… De la honte et de la folie. Sympa.

Seuls les hommes pouvaient se rendre aux lupanars

Les lupanars étaient un lieu exclusivement pensé pour le plaisir masculin. Aucune cliente ne pouvait pénétrer. Seulement des hommes. L’homosexualité, elle, était acceptée, mais les conditions étaient clairement établies : le client devait être le « dominant » et le prostitué « le dominé ». Si l’homosexualité n’était pas mal perçue, il était, à l’inverse, très mal vu d’avoir des relations passives. Bof bof open-minded, cette histoire.

Crédits photo (Domaine Public) : WolfgangRieger

Les lumières rouges, symboles des maisons closes

Les maisons closes sont un microcosme. Entre l’extérieur, souvent une façade froide et sans aucun signe distinctif, et l’intérieur, vivant et souvent largement décoré, le contraste est fort. Pour signaler l’emplacement d’une maison close, et à défaut de pouvoir afficher une grande enseigne, les tenanciers plaçaient simplement une lumière rouge à l’entrée. À partir de 1890, ces mêmes éclairages sont utilisés aux USA pour signaler les zones de prostitutions. À Amsterdam, cela aura donné le nom du célèbre « red light district ».

Au XIXe, Paris était considéré comme "Le bordel de l'Europe"

Au XIXe siècle, Paris attire par l’extension de son réseau ferré, l’amélioration de l’hôtellerie, les différentes Expositions universelles, mais pas que. À partir de la seconde moitié du siècle, un nouveau tourisme prend de plus en plus d’ampleur : le tourisme sexuel, dans les différentes maisons closes et lieux de racolage de la capitale. Les prostituées parisiennes inspirent les auteurs, les peintres et les photographes. On entend parler d’elles et de la ville « des plaisirs », « la ville légère », « excitante » ou encore « trépidante » aux quatre coins de l’Europe, voire du monde. Au même moment, en effet, les auteurs français sont massivement traduits et lus, les théâtres du monde adaptent des œuvres françaises… Petit à petit, de nombreux pays considèrent Paris comme la ville numéro un de l’amusement et du plaisir. Les maisons de « rendez-vous » s’y multiplient, notamment rive droite.

D'ailleurs, c'est au "Chabanais", à Paris, que le roi Edouard VII avait sa chambre réservée

Eh oui ! La maison close « Le Chabannais » a carrément joué un rôle stratégique dans les relations franco-britanniques, puisque avant de devenir roi du Royaume-Uni, Edouard VII y avait ses petites habitudes. Il y avait même fait installer un fauteuil un peu particulier, appelé « siège d’amour », afin de pouvoir continuer à s’envoyer en l’air malgré ses problèmes de santé. Une anecdote historique de cul comme on aime.

Les maisons closes ont été interdites en France en 1946

Une interdiction régit par la loi « Marthe Richard », éponyme de cette femme qui fut prostituée, aviatrice, espionne, résistante pendant la Seconde Guerre mondiale, puis politique, élue au Conseil de Paris. Lors de cette dernière vie, elle devient le porte-étendard du combat contre les maisons closes, alors que nombre de politiciens y ont, eux, leurs petites routines. Une loi qui a divisé, certains regrettant l’absence de lieux encadrés pour protéger les prostitués et encadrer les pratiques. Un an avant la loi, on comptait encore 1 500 maisons closes en France, dont 177 à Paris.

Les maisons closes n'étaient pas toutes aussi belles que le Chabanais

Au contraire, même. Il y avait un fort contraste dans le traitement des prostituées, entre les cinq maisons closes luxueuses de la capitale, et les autres. Dans ces lieux-là, les filles étaient choyées et bien traitées. Une vérité des milieux de la Haute, qui cachait la réalité des autres lieux, prisons sexuelles régies par la violence morale et physique, dans lesquels les passages à tabac, l’alcoolisme et la drogue étaient monnaie courante. Preuve d’un respect bien limité des travailleuses du sexe : les prostituées étaient appelées « colis » par les « courtiers ». Elles étaient soumises à une hiérarchie quasi militaire, devaient acheter elles-mêmes leurs tenues, leur linge et leurs produits hygiéniques auprès de la tenancière. De cette manière, elles étaient maintenues dans une spirale d’endettement, souvent utilisée pour justifier des retenues importantes sur leurs passes. Pour couronner le tout, elles travaillaient presque tous les jours et logeaient dans des établis ou des greniers.

En Europe....

Dans plusieurs pays frontaliers à la France, les maisons closes sont toujours légales. En Belgique, elles sont « interdites, mais tolérées ». Elles se trouvent surtout à la zone frontalière avec la France, et attirent beaucoup de clients français. En Suisse, on parle de « salons érotiques ». Ils existent légalement, depuis que le délit de proxénétisme a été supprimé du Code pénal du pays en 1992. En Grèce, il suffit d’avoir plus de 21 ans, d’être enregistré et titulaire d’une carte médicale, mise à jour toutes les deux semaines, pour se prostituer.

L’Allemagne, elle, est désormais considéré comme « Le plus grand bordel d’Europe ». En 2019, on comptait 3 500 maisons closes légales sur tout le pays, dont 500 à Berlin. Depuis la loi de 2002, légalisant la prostitution, le nombre « Eros Center » s’est multiplié. On compte à présent environ 400 000 prostituées pour 1 million de clients sur le territoire : c’est 15 fois plus qu’au Pays-bas. (Source)

... Et Amsterdam est encore un cas à part

Ce n’est un secret pour personne : certains quartiers d’Amsterdam, et plus particulièrement le « Red Light District », sont connus pour la prostitution. S’en est carrément devenu une activité touristique, proposée en tour organisé ou visite guidée par certaines agences de voyage.

Dans ce quartier, les maisons closes ne sont pas si closes que ça. On est loin de la façade grise qui ne laisse rien paraître : certaines « exposent » les prostituées dans des vitrines. Le quartier est organisé par rue : une rue pour les femmes de couleur, une pour les femmes grandes-tailles, une autre pour les ladyboys, etc. Pour symboliser la présence d’un(e) prostitué(e) transsexuel(le), la lumière rouge est remplacée par une lumière bleue.

Là-bas, l’activité reste encadrée. De nombreux policiers font des rondes dans le quartier, pour assurer la sécurité des travailleurs du sexe et des clients. Les photographies sont strictement interdites. Les professionnels doivent être enregistrés et s’inscrire au registre du commerce, disposer d’une licence prouvant leur autonomie, et être âgés d’au moins 21 ans.

Et saviez-vous que plusieurs mots de notre vocabulaire viennent de la prostitution ?

Sources : Le Monde, Sud Ouest, Libération