A l’occasion d’absolument pas l’anniversaire de la mort de Kennedy puisque nous ne sommes ni en novembre, ni en 2013, ni en 2023, il nous semblait plus que judicieux de revenir sur cet assassinat dont la portée échapper largement à la seule histoire politique américaine et se confond avec le mythe. D’autant qu’aujourd’hui encore, la lumière n’a pas été faite sur cet événement qui a nourri tous les fantasmes – et parfois à raison. La preuve.

Le service de sécurité était particulièrement léger à Dallas

Déjà, il est hallucinant que le secret service ait accepté que Kennedy défile en décapotable ouverte pour être vu des Texans. En temps normal, il aurait été du devoir des services de sécurité du président de refuser une telle demande. De plus, le déploiement policier était particulièrement léger : aucun sniper sur les toits, alors même que l’itinéraire du président était public. Cela ressemble quand même drôlement à une négligence volontaire.

On a laissé sortir Lee Harvey Oswald de l'usine d'où il aurait tiré

Aussitôt les coups de feu tirés, les policiers et le secret service se sont immédiatement intéressés à un dépôt de livre faisant face à la scène de l’attentat. Un passant avait aperçu un homme à une des fenêtres tenant dans ses mains ce qui ressemblait à une barre de fer – en réalité, le canon d’une carabine. Les flics se sont donc précipités vers ce dépôt de livres et en ont bloqué les issues. Sauf qu’à l’entrée, ils sont tombés sur un des employés du dépôt en train de se faire un café à la machine. Qu’ont-ils fait ? Ils l’ont laissé partir. C’était Lee Harvey Oswald et ce laxisme est très très très troublant.

Oswald était très probablement un honorable correspondant de la CIA

Le parcours d’Oswald est extrêmement chaotique et surtout infiniment contradictoire. Pendant son service militaire, il se fait dégager de l’armée en raison de ses lectures marxistes et de ses prises de position ouvertement pro-communistes (tellement ouvertement pro-communistes qu’on aurait dit qu’il jouait un rôle). Une fois démobilisé, il fréquente les milieux anti-castristes (vous voyez un peu le paradoxe) avant de… demander un visa pour aller bosser en URSS. Là-bas, il reste quelques mois et se marie, avant de se réfugier à l’ambassade américaine en demandant son rapatriement. Il obtient gain de cause et les autorités soviétiques le laissent partir accompagné de sa femme, une citoyenne soviétique, ce qui est un fait extrêmement rare – les autorités soviétiques refusaient généralement toujours de laisser partir leurs ressortissants. Et, une fois rentré au pays, il visite régulièrement les ambassades cubaine et soviétique afin d’obtenir un visa pour Cuba. N’importe quoi ? Oui, n’importe quoi et pour de bonnes raisons : Oswald avait très probablement été recruté par la CIA qui cherchait à lui construire un profil de type instable et fasciné par le castrisme.

Deux autopsies, deux conclusions

Le corps de Kennedy a été autopsié deux fois. Durant la première autopsie, une trachéotomie a été pratiquée, ce qui explique peut-être les conclusions différentes des deux expertises. Quoi qu’il en soit, selon l’une des autopsies, trois balles ont été tirées sur Kennedy ; selon l’autre, quatre balles ont frappé le président. Selon l’une des autopsies, les balles venaient de l’arrière ; selon l’autre, elles venaient de l’avant. Tout ça a une importance capitale car le modèle de carabine utilisé par Oswald était semi-automatique : en minutant exactement les événements, un tireur d’élite n’aurait pas eu le temps de tirer plus de 3 balles. Si une quatrième balle a été tirée, il y avait un deuxième tireur fatalement. Et si certaines balles avaient touché le président par l’avant, cette thèse se confirmait.

Dès les premiers jours de l'enquête, la question du deuxième tireur se posait

Et cette question s’est posée d’emblée. Parce qu’un talus pouvait servir à dissimuler un deuxième tireur, mais aussi parce que plusieurs témoins ont affirmé qu’une balle avait pénétré dans un panneau de circulation ; or, ce panneau de circulation a été immédiatement retiré de la scène avant de disparaître. De là à imaginer qu’on a sciemment escamoté des preuves, il n’y a qu’un pas.

La voiture a tout de suite été envoyée à la carrosserie

D’autant que la Lincoln dans laquelle se trouvait Kennedy a elle aussi immédiatement été envoyée à la carrosserie pour être recarrossée, rendant donc impossible l’analyse d’éventuels impacts de balles dans l’habitacle et empêchant de fait de déterminer précisément combien de balles avaient été tirées. Tout ça est quand même extrêmement troublant.

L'agent Tippitt et le meurtre raté

Oswald en fuite, son signalement est donné à toutes les polices de Dallas. On n’a guère que ça : son signalement. Pourtant, ce signalement suffit à un agent en patrouille, l’agent Tippitt, pour identifier Oswald non loin de l’immeuble où il séjournait. La concierge de l’immeuble, qui ne sera jamais interrogée officiellement, déclarera avoir entendu deux coups de klaxon émanant d’une voiture de police peu après qu’Oswald était revenu chez lui pour se changer. Comme un signal de rendez-vous. Quoi qu’il en soit, au cours de cette interpellation, Tippitt meurt, assassiné de plusieurs balles par Oswald. Mais comment est-ce possible qu’un agent aguerri se fasse ainsi surprendre ? Et surtout on peut s’étonner de voir que Tippitt se trouvait seul à bord de sa voiture de patrouille alors que l’usage veut que les policiers patrouillent à deux aux Etats-Unis. Il y a fort à parier que Tippitt et Oswald avaient rendez-vous et que Tippitt était chargé d’assassiner Oswald pour l’empêcher de parler.

Jack Ruby, la pierre angulaire de l'attentat

Finalement interpellé dans un cinéma, Oswald sera assassiné le lendemain par Jack Ruby, un mafieux notoire, alors même qu’il se trouvait au commissariat. Ruby est un drôle de personnage : le jour de l’assassinat, quelques heures avant la mort de Kennedy, il aurait demandé à un informateur du FBI s’il était « prêt à regarder des feux d’artifice ». Peu après, on le retrouve à une conférence de presse du procureur en train de corriger celui-ci lorsqu’il écorche le nom d’un groupuscule pro-castriste dont Oswald était le seul et unique membre : comment Ruby pouvait-il avoir connaissance de cette organisation qui n’en était même pas une ? Mais surtout : comment Ruby a-t-il pu pénétrer dans le poste comme on entre dans un moulin ?

Oswald et Kennedy ont été enterrés le même jour

Fun fact. Il y avait moins de monde aux funérailles d’Oswald.

La commission Warren était vouée à l'échec

Ce n’est qu’après bien des atermoiements que Lyndon Johnson, intronisé président à la mort de Kennedy, consentira à mettre en place une commission d’enquête présidée par Warren, à la tête de la Cour suprême américaine. Mais cette commission d’enquête sera continuellement entravée par les travaux du FBI, Hoover se faisant un malin plaisir à court-circuiter les travaux de la commission en opposant des fins de non recevoir à plusieurs demandes d’examen complémentaire, souvent au nom d’une supposée raison d’Etat. Quoi qu’il en soit, Hoover détestait Kennedy, d’autant que celui-ci menaçait de l’envoyer à la retraite ; quant à Johnson, il se trouvait en très mauvaise posture : visé par des enquêtes pour trafic d’influence et détournement de fonds, il avait été informé par le clan Kennedy de l’intention du président de ne pas reconduire leur ticket pour les élections de 1964.