Sur le papier, les séries Euphoria et Sex Education traitent plus ou moins du même sujet : des jeunes lycéens qui jonglent avec leurs problèmes en découvrant leur sexualité et plus si affinités. Dans la pratique, Euphoria découpe Sex Education en 4 et le donne à manger aux chiens.

Le réalisme

On sait juste que le bahut de Sex Education est en Grande-Bretagne. Sauf qu’il fait beau tout le temps (on se fout vraiment de notre gueule là) et que le monde extérieur à proprement parler ne semble pas avoir de prise sur le quotidien des jeunes. C’est carrément une bulle où certains soucis sociétaux n’ont pas l’air d’exister, au-delà de la météo, une sorte de Harry Potter à l’école des MST.

A l’inverse Euphoria n’épargne rien à personne : ennuis judiciaires, addictions en tout genre, violence, trafics, troubles mentaux, troubles alimentaires… Globalement les chances de survie de l’équipe de Sex Education dans l’univers d’Euphoria sont sensiblement les mêmes que celles de Casimir face à Godzilla. Ce qui nous amène au point suivant.

L’émotion

Là ça tient à plusieurs choses, à commencer par la distribution, l’écriture, le jeu d’acteur, la réalisation et… ouais en fait ça tient à la série toute entière quoi. Mais là où Sex Education va bien prendre soin de désamorcer les 3/4 de sa gravité pour rester safe et feel good en toutes circonstances, Euphoria filme un enchaînement de tragédies en plein écran. Alors oui c’est plus dur à regarder, mais c’est aussi plus satisfaisant à l’arrivée, surtout quand les larmichettes sont de la partie. Et ce n’est pas avec des quiproquos façon « Les Sous-Doués jouent à zizi-panpan » que ça va arriver.

Les scènes musicales

L’intégralité de la première saison d’Euphoria est rythmée par des choix musicaux qui rendent la plupart des scènes marquantes. Par exemple ci-dessous c’est une séquence du dernier épisode, un flashback qui revient sur l’enfer qu’ont vécu Rue, sa sœur et sa mère. L’équivalent dans Sex Education c’est juste le crush d’Otis qui débarque et qui le voit embrasser une autre fille sur fond de Crimson & Clover.

Gillian Anderson

Dans le rôle de la mère du héros, Sex Education a dégainé la légendaire Gillian Anderson (Scully de X-Files). Aucun cast adulte d’Euphoria ne peut rivaliser avec ça. Mais c’est sans doute parce qu’ils assument le fait d’être une série de jeunes qui ne repose pas le moins du monde sur ses personnages de parents, relégués à l’arrière-plan sans trahir le synopsis.

Toujours un point de plus pour Euphoria alors que S.E triche effrontément.

Ashtray

Malgré la différence de niveau on pourrait s’amuser à établir pas mal de correspondances entre certains personnages des deux séries : la nunuche (Aimee/Cassie), le crush si loin mais si proche (Maeve/Jules), le sportif secrètement tourmenté (Adam/Nate) et son père trop sévère (Michael/Cal)… Pareil pour la construction des deux premières saisons puisque chaque épisode démarre sur l’étude d’un cas précis à travers un personnage qui a « un problème ». Mais aucun perso de Sex Education ne correspond à Ashtray, un garçon d’à peine une dizaine d’années déjà dealer, avec le visage tatoué et le reste de la panoplie qui va avec. Ahstray, l’essayer c’est l’adopter.

Les héros

Sex Education nous présente Otis, qui a des problèmes d’érection dans la saison 1 et de l’angoisse face à son dépucelage en saison 2, le tout en esquivant les questions de sa mère, sexologue de renom. En gros c’est American Pie avec un masque woke qui braille partout « on va briser les clichés » sans spécialement assumer d’être quoi que ce soit d’autre qu’une comédie romantique.

Euphoria nous présente Rue (rien que le nom c’est déjà très street cred), qui sort de désintox et replonge tous les 4 matins dans la drogue, le tout en esquivant sa mère, infirmière. En gros c’est Requiem For A Dream avec pas de masque du tout.

La définition de la figure du « gosse à problèmes » semble légèrement édulcorée dans un des deux cas, sans parler de la petite différence d’enjeu entre un type qui doit braver des obstacles dans sa tête afin d’arriver à se branler (wouhou) et une fille qui manque de perdre la vie un épisode sur 3.

L’intrigue principale

Euphoria met Jules sur la route de Rue, une jeune fille trans qui se lie d’amitié-et-peut-être-plus avec l’héroïne. Leur relation est entravée par l’addiction de Rue, des menaces et un chantage d’un lycéen psychopathe, et on en passe. De leur côté Otis et Maeve sont dans une énième relation de friendzone qui s’inscrit dans l’horrible tradition Ross-Rachel made in Friends.

Otis et Ethan

Otis existe dans l’univers d’Euphoria. Sauf qu’il s’appelle Ethan. Mais sinon c’est toujours l’archétype du gentil puceau inoffensif un peu maigrichon. C’est une énième différence de choix qui distingue une bonne d’une mauvaise série : jamais Otis n’aurait dû être le héros de quoi que ce soit, tout au plus un perso secondaire un peu sympathique. Ou alors il fallait l’intégrer dans Big Mouth.

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Il n'a pas souffert, promis

L’image

Bon ben là ça va être rapide : on a d’un côté un téléfilm bien éclairé face à un enchaînement de visuels ultra esthétisés. Ce n’est pas qu’il y en a un supérieur à l’autre, c’est juste que Sex Education a renoncé à toute originalité dès le départ.

HBO et Netlix

HBO, qui produit et diffuse Euphoria, c’est la chaîne derrière Les Sopranos et The Wire.

Netflix, qui produit et diffuse Sex Education, c’est le truc derrière Casa de papel et Marseille.

Chacun en conclura ce qu’il en voudra quant à l’ambition artistique des deux networks.

Mais bon, si vous avez moins de 13 ans, Sex Education est sans doute le plus conseillé. Si vous êtes plus âgé et que vous préférez toujours ça à Euphoria, pas de panique, c’est juste que vous n’êtes pas trop fan des programmes anxiogènes (on ne le dira à personne). Vous pouvez aussi vous faire la main sur les séries les plus tristes.