On n’avait rien de mieux à faire alors on a pris notre courage à deux mains et on s’est mis devant Netflix pour 3h26 de The Irishman, le nouveau film de Scorcese produit ET diffusé par Netflix. Après les polémiques menées tambour battant par le réalisateur et son pote Coppola à propos des films Marvel, comparés à des parcs d’attraction plutôt qu’à du cinéma, on peut reparler un peu de cinéma et il faut bien reconnaître que du cinéma, dans The Irishman, il y en a beaucoup, et beaucoup plus que dans Avengers.

Parce que le casting est dingue

Quand on peut se permettre de filer un mini-rôle à peine parlant à Harvey Keitel, c’est qu’on a de quoi faire. De Niro, Pacino, Joe Pesci et même le mec qui jouait le méchant dans Titanic avec 20 ans de plus et moins de cheveux. La troisième collaboration dans le même plan entre De Niro et Pacino est la meilleure, et c’est une bonne nouvelle parce que ça faisait longtemps qu’on n’avait pas vu Pacino jouer dans un bon film.

Et Al Pacino est au-dessus

Dans le rôle de Jimmy Hoffa, il crève l’écran, vraiment. Avec une énergie qu’on ne lui avait plus vu depuis le trop décrié Parrain III. Sa gestuelle, sa présence à l’écran, sa capacité à passer d’un registre à l’autre sont incroyables et font oublier régulièrement dans les scènes qu’il mesure 20 cm de moins que tous ses compagnons de jeu.

Parce que l'histoire est passionnante

C’est une histoire bis de l’Amérique de la Guerre froide, celle des liens entre la mafia, les Kennedy, les syndicats et leur implication dans la lutte contre le castrisme, l’assassinat de JFK, la disparition de Hoffa et l’échec de la Baie des cochons. C’est un Rendez-vous avec X géant, basé sur les confessions d’un ancien haut-gradé du syndicat des routiers dirigé par Hoffa et tueur à gages de la mafia, confessions pour la plupart étayées par des recherches historiographiques par la suite.

Parce que ça ressemble à un requiem

Les acteurs ont vieilli, Scorcese a vieilli et le déferlement de violence laisse place à une certaine idée du train-train de la vie, des choix contraints, des ennuis, de l’aller simple vers le crépuscule et le ratatinement. Plutôt que d’essayer de se réinventer, Scorcese s’inspire de ce qu’il sait faire, de ce qu’il a apporté au film de mafia pour en tirer un nouvel enseignement, un enseignement plus vieux, plus sage, plus distancié, moins spectaculaire et sans doute plus triste.

Parce que de Niro rajeuni ressemble à un type qui ressemblerait à de Niro

En vrai on se demande si c’est un sosie, on s’interroge sur l’opportunité qu’il y aurait eu à utiliser du deepfake, puis on se dit que c’est mieux comme ça.

Parce qu'on ne se fait jamais chier même en 3h30 de film

Malgré une complexité initiale liée à la construction en flashbacks imbriqués, on retombe vite sur ses pattes et à partir de là on ne s’ennuie jamais. Le film est presque construit comme une partie de GTA où les missions succèdent au mission en dessinant, au fur et à mesure de la progression, une histoire plus globale qui dépasse de loin celle du personnage principal interprété par de Niro. Et à un moment on regarde l’heure et on se rend compte que ça fait trois heures qu’on regarde le film alors qu’on pensait avoir commencé il y a à peine une heure.

Parce que c'est un récit de l'intime et de la vacuité

L’incapacité à concilier ses différentes allégeances, à être l’homme qu’on voudrait, à savoir respecter des fidélités contrariées et à faire le bien. En ce sens, les scènes finales de Joe Pesci, qui cherche une rédemption par la foi, ont une portée bien plus forte qu’on aurait pu l’imaginer. Elles rappellent vraiment celles de Michael Corleone cherchant une absolution auprès de Jean-Paul Ier.

Parce que c'est le meilleur film Netflix jusqu'à présent, et de très très très très très loin

Il n’y a pas de match. Quiconque a essayé de regarder In the shadow of the moon sait.

Pour la scène du poisson congelé

Pas de spoiler ici, mais sachez qu’en plein milieu de son film, Scorcese décide de faire du Tarantino. Et comme Tarantino a beaucoup piqué à Scorcese, c’est une sorte de prêté pour un rendu qui est assez savoureux.

Parce qu'on vous le dit

Ça devrait vous suffire.

« Ils s’appellent tous Tony ces cons de Rital ».