La vie politique se divise en deux cycles : dans le premier, on voit des gens s’affronter, on s’agace et on compte les points tout en s’amusant du sang versé. Dans le deuxième, on critique tout ce qui a été dit pendant le premier cycle ET tout ce qui a été fait pendant le deuxième et on attend le retour du premier cycle. Le truc chouette c’est que les débats nous offrent un paquet de punchlines bien senties (ou bien pourries, mais qu’on n’oubliera pas). Petit tour d’horizon de celles qui nous ont le plus marquées.

Chirac-Mitterrand 1988

En course pour un second mandat, François Mitterrand est opposé à Jacques Chirac, son Premier ministre depuis 2 ans. La hiérarchie est bien rappelée.

Chirac : Permettez-moi de vous dire que ce soir, je ne suis pas le Premier ministre, et vous n’êtes pas le Président de la république. Nous sommes deux candidats, à égalité, et qui se soumettent au jugement des Français…

Mitterrand : Mais vous avez tout à fait raison, Monsieur le Premier ministre.

BAM.

Jospin-Chirac 1995

Après avoir bouffé Balladur, Chirac affronte Jospin au deuxième tour de la Présidentielle. Et il tape sur des bambous appelés Alain Minc.

Chirac: En ce qui concerne les salaires et contre l’avis d’un certain nombre des conseillers éminents de M. Jospin, comme M. Minc, (…)

Jospin : M. Minc a été plus longtemps conseiller de M. Balladur qui est plus proche de vous, encore qu’on ne sait pas très bien ! Il a annoncé qu’il votait pour moi. II est libre comme citoyen.

Chirac : Je vous le laisse.

Dans ta gueule Alain Minc.

Reagan-Mondale 1984

En lice pour son second mandat, Reagan affronte un type tombé dans l’oubli. S’attendant à se faire attaquer sur son âge (Reagan a 72 ans), il fait comme Eminem et prend les devants.

Reagan : Je veux que vous sachiez que je ne ferai pas de l’âge un enjeu de la campagne. Je n’exploiterai pas la jeunesse et l’inexpérience de mon opposant pour des visées politiques.

C’est ce qu’on appelle se prendre une grosse mondale.

Sarkozy-Hollande 2012

Sarkozy essaie de combler son retard et réagit aux propos de Hollande qui le ramène aux affaires pesant sur lui.

Sarkozy : Vous êtes un petit calomniateur.

Hollande : Ne ramenez pas la France à votre personne.

Clinton-Dole 1996

On sait que Bill Clinton va gagner, et personne ne se souvient de Bob Dole, le candidat républicain. Celui-ci s’attendait à être attaqué sur son âge (73 ans). Clinton ne fait pas cette bêtise.

Clinton : Ce n’est pas l’âge de Bob Dole que je remets en cause. C’est l’âge de ses idées.

DTG.

Obama - Romney 2012

Mitt Romney essaie de déstabiliser Barack Obama en l’attaquant sur les coupes qu’il a réalisées dans l’armée, et notamment dans la marine. Obama se fout de sa gueule ouvertement.

Obama : Je crois que le gouverneur Romney n’a peut-être pas passé assez de temps à regarder comment nos forces armées fonctionnent. Vous avez mentionné la Navy et le nombre inférieur de navires par rapport à 1916. Eh bien, gouverneur, nous avons également moins de chevaux et de baïonnettes parce que notre armée a changé.

Traduction : Romney a une vision du monde digne de 1860.

Mitterrand - Giscard 1981

Après s’être fait démonter la gueule en 1974 lors du débat qui l’opposait à Giscard, lequel le renvoyait à son âge et à son parcours en le traitant d' »homme du passé », Mitterrand décide de mieux se préparer. Frappée par la crise pétrolière, la France a en effet vu son endettement augmenter pendant la deuxième partie du septennat précédent. Ça tombe.

Mitterrand : Vous avez tendance à reprendre le refrain d’il y a sept ans : l’homme du passé. C’est quand même ennuyeux que, dans l’intervalle, vous soyez devenu, vous, l’homme du passif.

VDTG, comme Vlan Dans Ta Gueule.

Chirac-Fabius 1986

Pendant la campagne des législatives de 1986, Jacques Chirac, leader du RPR, est confronté au Premier ministre Laurent Fabius, lequel l’interrompt fréquemment pour corriger ses dires. Chirac craque.

Chirac : Soyez gentil de nous laisser parler, et de cesser d’intervenir incessamment, un peu comme le roquet.

Fabius ne s’en remet pas et le RPR remporte les législatives tranquillou pilou.

Les espagnols sont des punks - 1 (2016)

Alors que l’Espagne est en crise institutionnelle depuis un an, un débat a eu lieu en août 2016 entre Mariano Rajoy, du Partido popular (droite droite), Pedro Sanchez, du PSOE (centre gauche), Pablo Iglesias, de Podemos (gauche gauche), et Albert Rivera, de Ciudadanos (centre droit). Une conclusion : les espagnols sont des punks.

Rajoy à Iglesias : Donc vous êtes l’unique démocrate de cette Chambre ? Vous êtes le seul homme politique honnête ? Monsieur Iglesias, vous êtes incroyable. Vous êtes la quintessence de la vertu. le seul homme décent. Celui qui a toujours raison.

Les espagnols sont des punks - 2

Toujours dans le même débat, Pedro Sanchez s’adresse à Mariano Rajoy.

Sanchez : Je vais être clair. On votera non à votre investiture. Et on ne s’abstiendra pas non plus.

Ouais c’est clair, mais ça aurait pu être moins alambiqué.

Trump - Clinton 2016

Lors du premier débat pour la présidentielle américaine de 2016, Clinton a pas mal envoyé chier Donald Trump.

Donald Trump: (Pour être Président), il y a tellement de choses différentes qu’il faut être capable de faire, et je ne crois pas qu’Hillary ait l’endurance.

Hillary Clinton: Eh bien, une fois qu’il aura voyagé dans 112 pays et négocié un accord de paix, un cessez-le-feu, une libération de dissidents, l’ouverture de nouvelles opportunités et nations dans le monde, ou même passé onze heures à déposer devant une commission du Congrès, je pense qu’il pourra me parler d’endurance.

Bim bam boum.

Trump - Biden 2020

Le tout premier débat à la présidentielle américaine 2020 vient de se passer et franchement ce serait presque comique si ce n’était pas triste à pleurer. Trump se débattant avec son charisme de caillou qui épilogue sur l’absence d’intelligence supposée de ton opposant : « Vous avez utilisé le mot « intelligent » ? Vous étiez le dernier de votre classe à l’université, n’employez pas le mot « intelligent » avec moi parce que vous savez quoi, il n’y a rien d’intelligent chez vous. »

Quant à Biden, il ne s’est pas laissé faire « Vous êtes le pire président que les Etats-Unis n’ont jamais connus. » Au moins c’est clair.

Le problème, c’est qu’il jacasse Trump, il en a toujours à redire ce qui a abouti à cette phrase malencontreuse de Biden : « Est-ce que tu vas la fermer, mec ? ».

Ça s’annonce sympa cette élection.

Dans le même genre, on a aussi les pires insultes de politiciens mais surtout les preuves que les Etats-Unis sont un pays vraiment chelou.