Quand on fouille un peu, on se rend compte qu’un paquet de meufs dans l’histoire ont adopté des pseudo masculins pour publier leurs ouvrages. Non pas qu’elles n’auraient pu les éditer avec leur véritable identité (quoique) mais elles ont voulu par cette astuce être mieux considérées et prises au sérieux par leurs pairs et par les lecteurs. On ne vous listera pas la totalité des femmes de lettres qui sont passées par ce truchement mais celles dont le choix de pseudonyme nous semblait le plus résulter d’un véritable engagement politique.

Amantine Aurore Lucile Dupin, baronne Dudevant, alias George Sand

Certes, on sait tous aujourd’hui que Georges Sand était une femme (on a même tendance à la visualiser sous les traits gracieux de Juliette Binoche parce qu’elle l’interpréta dans Les enfants du siècle de Diane Kurys). Elle était particulièrement engagée pour la cause des femmes, rejetait le diktat du mariage et s’est illustrée tout au long de sa vie dans des histoires d’amour tumultueuses (CF. Alfred de Musset TMTC), elle a même lancé une mode vestimentaire plutôt masculine, c’est donc sans surprise qu’elle continue à faire un gros fuck à la société en adoptant un pseudo masculin.

Marie d'Agoult, alias Daniel Stern

Il faut dire que George Sand et sa bonne idée de choisir un blase masculin a créé des émules. C’est ainsi que Marie d’Agoult, sa vieille pote, a fait de même. Le nom est toutefois moins connu car elle n’a publié que deux essais Histoire de la Révolution de 1848 et Essai sur la liberté.

Mary Ann, alias George Elliot

Écrivain incontournable de l’époque Victorienne, cette romancière a opté pour un pseudonyme masculin (alors qu’à son époque déjà plusieurs femmes de lettres s’étaient fait connaître sous leur véritable identité) tout d’abord pour qu’on la prenne davantage au sérieux mais aussi pour distinguer ses deux carrières (d’un côté l’édition et la critique littéraire et de l’autre ses écrits).

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Elsa Triolet, alias Laurent Daniel

Son nom d’origine ne vous est pas inconnu ? C’est normal, elle l’a principalement utilisé. D’origine russe, elle est née sous le nom Ella Yourevna Kagan et a pris part à la Révolution russe en 1905 avant de rejoindre la résistance française. En traînant avec les artistes et communistes de Montparnasse, elle rencontre Aragon et devient sa muse. Elle crée des colliers, écrit des reportages et fait des traductions russes avant d’entreprendre l’écriture de romans. En fait elle n’a écrit qu’un seul roman sous pseudonyme « Les Amants d’Avignon » publié en 1943 car elle était encore clandestine, mais le roman est désormais édité sous son vrai nom.

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Jeanne Loiseau, alias Daniel Lesueur

Auteur ultra prolifique du XIXème siècle. L’Académie littéraire lui décerne même plusieurs prix. C’est son premier éditeur qui lui a imposé de choisir un pseudonyme masculin. Elle a donc pioché dans les noms de ses ancêtres mais avouera plus tard qu’elle n’était pas fan de son blase, choisi dans la précipitation. Elle ne va pas le changer en revanche elle rajoute un trait d’union afin qu’on ne soit pas tenté de l’appeler Mme Lesueur. Elle a également fondé une assistance pour les veuves d’écrivains qui finissent dans un kopeck (d’ailleurs à sa mort c’est une autre femme de lettres qui reprendra la fondation, et comme par hasard qui utilise aussi un pseudonyme masculin Jean Dornis, alias Élena Goldschmidt-Franchetti).

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Elizabeth Mackintosh, alias Gordon Daviot

Faut dire que cette femme de lettres britannique du début du XXème siècle collectionne les pseudo. Elle a ainsi écrit une série de romans policiers sous le nom de Josephine Tey puis signe une douzaine de pièces de théâtre sous le pseudo Gordon Daviot. Pas ouf comme pseudo. Elle aurait pu choisir un truc un peu plus stylé quand même.

Victoire Léodile Béra, alias André Léo

Cette militante féministe et anarcho-socialiste du XIXème siècle (elle a d’ailleurs été aux côtés de Paule Minck et Louise Michel) a aussi été une femme de lettres. Elle publie d’abord sous son vrai nom puis opte pour le pseudonyme André léo composé des prénoms de ses deux jumeaux. Elle crée en 1866 l’Association pour l’amélioration de l’enseignement des femmes et publie un texte sur l’égalité des sexes (qui servira de point d’appui à un premier mouvement féministe).

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Marie de Heredia, alias Gérard d’Houville

Cop’s de Leconte de Lisle, Paul Valéry et Pierre Louÿs (qui sera d’ailleurs par la suite un de ses nombreux amants), l’écrivaine à choisi le nom de jeune fille de sa grand-mère pour son pseudonyme sous lequel elle a reçu le tout premier prix de littérature de l’Académie française en 1918 pour l’ensemble de son oeuvre ce qui en fait (malgré l’Académie) la première femme à recevoir ce prix.

Jeanne Philomène Laperche, alias Pierre de Coulevain

Elle publie d’abord son premier roman sous son un pseudo féminin Hélène Favre de Coulevain (qui recevra d’ailleurs un prix en 1899) avant d’adopter le nom de plus Pierre de Coulevain. Comme elle produit des romans de forme autobiographique, beaucoup de lecteurs ont confondu l’écrivain et son personnage principal du même nom.

Alice Marie Céleste Durand, alias Henry Gréville

Femme de lettres française boulonnaise pur-sang, elle vit longtemps en Russie ce qui lui inspire de nombreux romans sur la société russe. Et puis en rentrant en France, elle devient hyyyyper connue, genre même Maupassant parle d’elle en disant « De toutes les femmes de lettres de France, Mme Henry Gréville est celle dont les livres atteignent le plus d’éditions. Celle-là est surtout un conteur, un conteur gracieux et attendri. On la lit avec un plaisir doux et continu ; et, quand on connaît un de ses livres, on prendra toujours volontiers les autres ». Ou Jules Barbey d’Aurevilly qui en parle ainsi « C’est encore une femme, à ce qu’il paraît, ce monsieur-là ! » mettant le doigt sur ce qui semblait être devenu une habitude : prendre le nom d’un homme pour se faire entendre.

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Et oui ce top est signé Pierre Galouise. Pseudonyme officiel de Louise Pierga. Voilà. Je l’avoue. Je suis démasquée.

Sources : compagnie littéraire