Ca y’est, c’est interdit : les autorités hong kongaises ont prohibé le port de masques dans les manifestations incessantes qui secouent l’île depuis plusieurs mois. Il faut dire que, depuis le début de la contestation, le port du masque a joué un rôle marquant, permettant aux manifestants de conserver une forme d’anonymat pour éviter les représailles terribles du gouvernement pro-chinois. Et ces masques n’étaient pas choisis par hasard.

Les anonymous et le masque de Guy Fawkes de V pour Vendetta

Dans V pour Vendetta, un vengeur masqué se réfère à Guy Fawkes pour sauver l’Angleterre du totalitarisme. Le film (médiocre) adapté de la BD culte a popularisé ce masque qui est devenu un symbole de résistance à l’oppression. Les Anonymous ont été les premiers à récupérer ce symbole pour leurs campagnes de lutte en faveur de la liberté d’expression et pour la transparence. Mais les masques sont aussi visibles, désormais, dans de nombreuses manifestations, y compris en France.

L’ironie du sort, c’est que le masque de Guy Fawkes s’est tellement bien vendu qu’il a considérablement enrichi Amazon (et les usines chinoises qui le produisent). En 2011, c’était ainsi le déguisement le plus vendu sur Amazon. Sans compter que les droits de reproduction du masque reviennent à… Time Warner. Pas des anges non plus.

Des masques de Winnie l'Ourson

Winnie l’Ourson était déjà dans le collimateur des autorités chinoises depuis un moment et ses films avaient été retirés des bibliothèques en raison de l’idéologie subversive dont ils faisaient apparemment l’étalage. Mais là, c’est carrément toute mention de Winnie sur les réseaux sociaux chinois qui a été bannie en raison des nombreuses analogies faites par les internautes entre le président Xi Jinping et l’ourson sympa. Xi Jinping incarne une figure présidentielle beaucoup plus autoritaire que son prédécesseur, Hu Jin Tao, et n’aime pas trop qu’on se foute de sa gueule.

Du coup, logiquement, la figure de Winnie est devenu un signe de ralliement pour tous les opposants au régime chinois et notamment dans les rues de Hong Kong où la colère gronde depuis l’été 2019. (Pour tout comprendre sur la situation à Hong Kong, nous avons un top dédié.) De toute façon, le régime chinois est coutumier du fait ; on ne compte plus le nombre de choses censurées en Chine.

Le masque de Salvador Dali de La Casa de papel

Le masque de Dali a été choisi par les créateurs de la série parce qu’il avait fait de son oeuvre poétique et artistique une geste capitaliste assumée, allant même jusqu’à se faire surnommer Avida Dollars par André Breton après sa rupture avec le surréalisme. En portant ce masque, les manifestants (notamment en Espagne et au Liban) reprennent une figure du capitalisme pour condamner le capitalisme. Exactement comme dans la Casa de papel. Et vous pouvez acheter le masque de Dali ici, que vous vouliez vous déguiser ou changer le monde.

Le Joker

Le succès du film de Todd Philips a très vite fait des émules. A Hong Kong et au Liban, notamment, c’est maquillés en Joker que les manifestants défilent. Il faut dire que le film présente le Joker comme un exclu de la société, tenu de sombrer dans la violence parce que la société le rejette. Au Liban, les manifestations pacifiques ont conduit le premier ministre à démissionner. Les Libanais réclament davantage de transparence dans la vie publique et se regroupent entre groupes confessionnels différents autour d’une exigence de démocratie accrue.

Pepe the Frog

Ce symbole de l’extrême-droite américaine est en passe d’être récupéré par les militants hong-kongais pour la liberté. Figure totalement Incel (c’est un ado mal dans sa peau qui bouffe des pizzas et joue aux jeux vidéo), Pepe a été largement relayé par l’alt-right pro-Trump à compter de 2008 sous forme de milliers de memes. Son créateur, Matt Furie, n’envisageait pas du tout de voir sa créature lui échapper à ce point. Mais la grenouille a désormais une nouvelle vie et allez savoir comment et pourquoi les Hong Kongais ont récupéré ce symbole dans leur combat pour la liberté.

Sinon, y’a un Jamaïcain qui est allé chercher son gain à la loterie déguisé en Scream pour demeurer anonyme.