Certainement un des métiers les plus chelous du cinéma, indispensable mais très méconnu, les bruiteurs de cinéma ont pourtant un taff très étonnant. Parce que sur un tournage, on ne retient que les voix des comédiens, alors il faut bien que des petites mains à l’oreille fine recomposent tous les autres sons de manière artificielle. En fait, c’est un boulot qui n’est bien fait que quand il est imperceptible auprès des spectateurs.

En France on compte une trentaine de bruiteurs cinéma (dont seulement 3 ou 4 femmes)

John Roesch, un célèbre bruiteur américain disait très justement « Il y a davantage d’astronautes que de bruiteurs ». Et pourtant on parle du bruiteur régulier de Lucasfilm ! Un bruiteur travaille en moyenne sur une dizaine de films chaque année. S’il y en a aussi peu en France c’est aussi parce que ce genre de taff est délocalisé (oui, oui, le cinéma n’est pas exempt de la délocalisation) et qu’on va faire faire ça en Belgique principalement. Quant au fait qu’il y a aussi peu de femmes cela s’explique (en théorie) par le faire que le métier de bruiteur à l’origine consistait à se trimbaler avec des énormes valoches, et que les femmes toutes menues, fragiles et frêles qu’elles étaient n’avaient pas forcément les épaules pour un métier aussi physique…

Souvent ils doivent sonoriser des trucs qui habituellement ne font aucun bruit

Par exemple, la bruiteuse Judith Guittier (CF. « Ecouter le cinéma » sur Arte Radio) raconte qu’on lui a demandé pour un film de reproduire le battement d’aile du papillon ce qu’elle est parvenue à inventer avec un mouchoir en papier qu’on tapote avec les doigts. Fallait y penser. Bref, le métier ne consiste pas uniquement à reproduire artificiellement des sons qui existent déjà mais aussi à en inventer à part entière.

Dans le film La Haine on passe d'un son mono dans Paris à un son stéréo dans la banlieue

Cette anecdote qui nous est racontée dans le podcast « Ecouter le cinéma » sur Arte Radio est hyper intéressante pour piger le construction du film. Cet effet sonore donne aux personnages qui déambulent dans Paris l’impression de se trouver dans une ville inconnue et dangereuse alors que la cité offre un son large plus rassurant.

En anglais, les bruiteurs sont mentionnés "foley artists" au générique

En référence au premier bruiteur Jack Donovan Foley qui a développé les premières techniques de reproduction du son au début du XXème siècle.

Dans un auditorium de bruiteur, tout fait du bruit

Du sol au plafond, chaque surface est destinée à reproduire un bruit bien spécifique. Les murs sont armés de portes en tous genres, vitrée ou non pour correspondre chacune au son recherché. Ça donne un studio assez marrant à voir, chamboulé de valises remplies d’objets bien étranges qui seront en mesure de nous retranscrire toutes les scènes possibles et inimaginables en son.

On bruite rarement un objet par le même objet

Quand on est bruiteur il faut avoir un certain sens de la créativité et inventer avec les moyens du bord. Si quelques sons classiques seront principalement reproduits par les mêmes objets comme le claquement d’une porte pour le bruit d’un talon de chaussure sur le sol, la plupart des sons sont fabriqués à partir d’objets qui n’ont rien à voir : un couteau contre un plateau en fer pour une grille qui grince, une agrafeuse qu’on sort de sa poche pour une arme qu’on dégaine, des dés dans un verre d’eau pour faire le bruit des glaçons dans un cocktail, un gant mouillé frappant le sol pour une gifle etc…

Pour le bruitage des pieds, on n'utilise qu'un seul pied

Plus pratique car on est plus stable. D’autant plus que si on met les utilise les deux pieds on produit aussi malgré nous des bruits parasites avec les vêtements.

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"*TUIUIUIUIUIU* Oui allô ? / Oui ce serait pour signaler un lien disparu / Ok on envoie nos équipes d'enquêteurs sur le coup"

A l'origine, le cri du monstre japonnais Godzilla a été conçu avec un gant de crin frotté contre une contrebasse

L’invention des bruits de monstres est un truc super kiffant pour un bruiteur. Certains composent un son inventé de toutes pièces comme pour Godzilla, d’autres inventent des bruits à partir de son existants. Par exemple, pour le film Premier contact de Denis Villeneuve, le bruiteur Nicolas Becker a inventé le langage des espèces de pieuvres martiennes à partir du chant des baleines. Les soufflements des vélociraptors dans Jurassic Park et la fabuleuse scène de la cuisine sont des respirations de chevaux…

Il n'y a pas de formation spécifique pour devenir bruiteur

Le meilleur (pour pas dire le seul et l’unique) moyen de devenir bruiteur, c’est de suivre un bruiteur qui existe déjà et de l’assister un certain nombre d’années avant de voler de ses propres ailes.

Et quelques astuces de bruitages qui nous font halluciner

Pour faire du feu, on peut tripoter un balai en paille pour faire des crépitements

Ou foutre directement le feu au balai. C’est selon.

Pour faire de la pluie on peut utiliser un baton de pluie (option facile) ou faire tomber des grains de riz

En plus après on peut se faire un plat de riz pour le midi. Bon plan.

Pour faire des pas dans la neige, on peut marcher dans de la fécule de pommes de terre

Qui l’eut cru ?

Pour faire un bruit de craquement d'os on peut croquer des pâtes crues (entre autre)

EN ce qui concerne le craquement d’os, il y a plein de solutions possible. On peut couper de la salade, ce qui donne un bruit moins sec qui rappelle davantage le bruit d’un os humain et de sa chair, Judith Guittier raconte qu’elle a du faire une scène de torture (pour le film Total Western) en tranchant des endives pour obtenir de son des os qu’on brise… Dans Psychose , le son de la scène de la douche a été produit avec un melon qu’on transperce.

Pour faire des pas de chiens avec leurs petites griffes, on peut utiliser des gants avec des petits boutons cousus au bout de chaque doigt

Technique bien tirée par les cheveux sortie tout droit de la tête de la bruiteuse Judith Guittier.

Pour reproduire le son de poils qui poussent (comme pour un loup garou par exemple) on peut peler un pamplemousse

C’est du moins la technique de Nicolas Dubois qui raconte dans le podcast d’Arte Radio cité en sources, que le pamplemousse est un fruit idéal pour faire plein de bruits dégueulasses de chair humaine.

Après il faut bien noter qu’il n’y a pas de règle. Chaque bruiteur a ses propres astuces et il y a plein de façon différentes de produire des sons similaires.

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Il est parti à la ferme des liens cassés pour prendre des petites vacances, il est avec tous ses copains, ne t'inquiète pas.

Source : Cineastuces « Ecouter le cinéma » sur Arte Radio, France Culture, Boxsons, France Inter